MAGAZINE CONSTAS

Les Chantiers et la Covid-19

Constas rencontre Manuelle Oudar, PDG de la CNESST

Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail

« Nous avons été partie prenante des décisions, mais celles-ci ont également été prises par les employeurs, les syndicats et les associations . »

Pour réussir à permettre aux travailleurs du secteur de la construction de réintégrer les chantiers après plusieurs mois d’arrêt, la CNESST a dû faire un tour de force, alliant collaboration et agilité. Entrevue.

Par Florence Sara G. Ferraris

 

Selon les plus récentes statistiques compilées par la CNESST, la trousse sectorielle dédiée à l’industrie de la construction a d’ailleurs été, de loin, la plus utilisée.

Si on avait demandé en février à la présidente du conseil d’administration et chef de la direction de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), Manuelle Oudar, ce dont l’année 2020 serait faite, elle n’aurait jamais pu imaginer le quart de ce qui l’attendait dans les mois à venir. « On a été pris de court, comme tout le monde, lance-t-elle. On peut dire que 2020 a été l’année de tous les apprentissages ! »

 

Il faut dire que les chantiers du Québec ont été bien silencieux ce printemps. Mise sur pause le 25 mars dernier en raison des mesures de confinement imposées par la COVID-19, l’industrie de la construction a dû, à l’image de la plupart des secteurs d’activités économiques de la province, faire preuve d’une flexibilité et d’une inventivité sans précédent au cours des derniers mois. « Pour réagir à cette crise exceptionnelle et respecter les mesures de confinement imposées par le gouvernement, puis pour permettre aux travailleurs de réintégrer leur milieu de travail en toute sécurité, il a fallu gérer plusieurs niveaux de risque à la fois, souligne celle qui occupe la position de présidente depuis 2015.  »



Nécessaire collaboration

Concrètement, cela a été rendu possible grâce aux importants efforts de collaboration déployés au sein de l’industrie de la construction. Interrogée à ce sujet, Manuelle Oudar est d’ailleurs élogieuse sur la rapidité de réaction dont ce secteur d’activité a su faire preuve. « Il a été d’ailleurs le premier à réunir l’ensemble des acteurs autour d’une même table pour discuter des enjeux soulevés par cette crise sans précédent, précise la PDG avec enthousiasme. Nous avons donc été partie prenante des décisions, mais celles-ci ont également été prises par les employeurs, les syndicats et les associations ; le tout en accord avec les directives de la Santé publique. »

C’est du reste cette concertation qui a permis à la CNESST de publier ce printemps une première trousse d’outils en réaction à la pandémie, mais aussi de l’adapter à mesure que de nouvelles informations sur le virus étaient disponibles. Les différents guides publiés par la suite pour les autres secteurs d’activité se sont d’ailleurs fortement inspirés de cette première mouture.

Condensé des bonnes pratiques, ce guide a permis aux différents acteurs de mieux comprendre les impacts et risques possibles liés au coronavirus, mais aussi de déterminer d’un commun accord les mesures les plus adaptées aux besoins de l’industrie afin de préserver la sécurité et la santé de l’ensemble des travailleurs. « On n’aurait jamais pu élaborer ce guide sans consulter les acteurs présents sur le terrain, insiste Manuelle Oudar. Ils ont pu nous aiguiller concernant les différentes réalités des chantiers et des corps de métier représentés. » À titre d’exemple, la gestionnaire cite notamment le port du masque lors des périodes de grande chaleur ou le maintien de la distanciation sociale dans des contextes où de lourdes charges sont impliquées.

Pour le moment, les différentes mesures mises en place, qu’elles concernent la stabilité des équipes de travail ou les ajustements en matière d’équipement, semblent porter fruit, peu ou pas de cas ayant été répertoriés sur les chantiers depuis la reprise.



Réaction positive

Plus, c’est grâce à cette collaboration en amont que les nouvelles normes – « toutes basées sur des lois et des règlements déjà existants », précise Mme Oudar – ont été aussi bien accueillies par l’industrie. « Le fait d’avoir une table paritaire au moment de l’élaboration du guide a permis à notre stratégie de communication de se faire beaucoup plus naturellement, explique-t-elle. Parce qu’en participant on comprend mieux, mais on se sent aussi plus investi. Les personnes impliquées sont ainsi devenues des ambassadeurs dans leur milieu respectif ! » Selon les plus récentes statistiques compilées par la CNESST, la trousse sectorielle dédiée à l’industrie de la construction a d’ailleurs été, de loin, la plus utilisée.

« Il faut dire, ajoute-t-elle, que l’industrie de la construction en est déjà une où les acteurs se parlent sur une base régulière. On a pu tabler sur des liens qui existaient déjà, c’est sans aucun doute ce qui nous a permis d’être aussi proactifs ! » ■


Interventions effectives de la CNESST après enquête épidémiologique

  • 3 026 dossiers
  • 575 plaintes
  • 5 réclamations acceptées
Dans ses relevés statistiques, la CNESST indique qu’il y a eu 3 026 dossiers d’intervention pour le secteur de la construction relativement à la COVID-19 entre le 13 mars et le 16 août 2020, notamment à la suite de 575 plaintes. De ce nombre, elle n’avait accepté que 5 réclamations pour lésion professionnelle en lien avec le virus, après enquête et évaluation épidémiologique.