MAGAZINE CONSTAS

Modernité du projet Turcot

Place aux femmes de métier

Pour que l’intégration des femmes au chantier soit une réussite, il faut une réelle volonté de la part des dirigeants. Et que cette volonté soit transmise à toute la chaîne de commandement.

Le projet Turcot ne se démarque pas seulement sur le plan de la conception-construction. Il se distingue également par la place qu’il accorde aux travailleuses de la construction. Regard sur un chantier où la mixité est tout, sauf une figure de style.

Par Marie Gagnon

Michel Fournier

En 2016, elles étaient à peine une dizaine à évoluer dans l’enchevêtrement de voies constituant l’échangeur Turcot. En 2017, elles étaient plus de 30, – 33 pour être exacte. Par la suite, elles se sont maintenues entre 20 et 30, et ce, jusqu’à tout récemment. Qui sont-elles ? Des femmes de métier, détentrices d’un certificat de compétence et pour la plupart recrutées à l’occasion d’ouvertures de bassins dans la région métropolitaine. Et dont l’embauche a été facilitée par le Programme d’accès à l’égalité des femmes dans l’industrie de la construction 2015-2024.

« On avait besoin de conducteurs de camions et on a voulu donner l’opportunité aux filles de se joindre à l’équipe, explique Michel Fournier, directeur des relations de travail pour KPH Turcot. Comme les femmes ont la priorité lorsqu’il y a ouverture de bassins, sur les quatre-vingts camionneurs embauchés, on a recruté douze filles. Certaines sortaient tout juste du Centre de formation du transport routier et elles sont toujours à notre emploi. »



 

Michel Fournier insiste sur la nécessité de se doter de politiques claires pour contrer le harcèlement et la discrimination au chantier et, de là, favoriser la rétention des travailleuses.

C’est le cas notamment de Karolane Lavoie. Originaire de Charlevoix, elle conduit des poids lourds dans le Nord-du-Québec lorsqu’elle apprend que KPH Turcot cherche des camionneurs. Après une courte entrevue téléphonique, elle est enrôlée en août 2017. Au dire de Michel Fournier, elle s’est très bien adaptée dans un milieu à prédominance masculine et a su démontrer un certain leadership. Remarquée par ses superviseurs, elle a été promue chef d’équipe puis contremaître à l’été 2020.

Cloé Doucet, gérante de construction pour le projet Turcot. Au sein de Kiewit, les femmes ne sont pas de simples figurantes. Elles veillent à la prévention, pilotent des engins lourds et occupent des postes de commandement. CR: KPH Turcot

Des moyens efficaces

Même s’il aurait aimé engager davantage de femmes, Michel Fournier constate qu’elles ne sont pas si nombreuses à vouloir intégrer l’industrie. Il déplore du même souffle le peu d’efforts consentis à la promotion des métiers de la construction auprès des clientèles féminines. « En 1995, le premier programme pour la mixité au chantier n’a pas connu beaucoup de succès, note le gestionnaire qui œuvre depuis 25 ans en relations de travail dans l’industrie. Et le nouveau programme ne marchera pas plus tant que les entreprises ne prendront pas les moyens nécessaires pour favoriser l’embauche et le maintien en emploi des femmes. »



Pour que l’intégration des femmes au chantier soit une réussite, il faut une réelle volonté de la part des dirigeants. Et que cette volonté soit transmise à toute la chaîne de commandement, c’est-à-dire jusqu’aux surintendants et aux contremaîtres. Michel Fournier insiste également sur la nécessité de se doter de politiques claires pour contrer le harcèlement et la discrimination au chantier et, de là, favoriser la rétention des travailleuses. Sans oublier l’application de sanctions disciplinaires en cas de non-respect des politiques en place.

Une vision constructive

Il rappelle l’engagement de Kiewit en matière de mixité au chantier, engagement exprimé à travers un programme nommé Women in Kiewit. Conçu à l’intention des gestionnaires, ce programme vise à attirer et à retenir les femmes désireuses d’intégrer l’industrie. « On a aussi le Women in Construction and Engineering Leadership Seminar, qui propose de courts séminaires permettant de découvrir le milieu de la construction, ajoute Cloé Doucet, gérante de construction pour le projet Turcot. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai connu Kiewit en 2010. » ■


KPH TURCOT, récipiendaire du PRIX RECONNAISSANCE-MIXITÉ DE L’ACRGTQ

Mélanie Béland CR: Kiewit
En janvier 2020, l’Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec (ACRGTQ) remettait à KPH Turcot le prix Reconnaissance-mixité.
KPH Turcot a été l’organisation qui s’est démarquée en 2019 en embauchant un très grand nombre de femmes détenant un certificat de compétence de l’industrie de la construction. KPH Turcot se distingue notamment pour l’accueil et la mise en place d’outils de rétention des femmes notamment sur le chantier Turcot. On se rappellera que Construction Kiewit, partenaire du consortium, a une politique favorisant l’embauche des femmes sur ses chantiers. Elle croit à l’égalité et aux bienfaits de la présence des femmes sur les chantiers et en fait la promotion.