Tour de ville / Grand entretien avec Chantal Rouleau
Ministre déléguée aux Transports et ministre responsable de la Métropole et de la région de Montréal
L’échangeur Turcot, le transport collectif, le tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, autant de sujets que la ministre a pris le temps d’aborder avec Constas.
Mairesse d’arrondissement de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles de 2010 à 2018, élue à l’Assemblée nationale du Québec, aux élections provinciales de 2018, députée de Pointe-aux-Trembles sous la bannière de la Coalition avenir Québec, Chantal Rouleau a été nommée, la même année, ministre déléguée aux Transports et ministre responsable de la Métropole et de la région de Montréal.
Par Jean Brindamour
Q. Qu’en est-il des concertations du gouvernement avec les Montréalais en général et la Ville en particulier dans ce dossier majeur qu’est l’échangeur Turcot ?
R. La Ville de Montréal est, après tout, l’une des principales parties prenantes du projet Turcot. Elle a été impliquée en amont du projet dans plusieurs dossiers, tels que le plan de gestion de la circulation, les acquisitions et le plan de drainage, etc., et continuera de l’être jusqu’à la toute fin.
Plusieurs canaux de communication ont aussi été utilisés et plusieurs actions de communication ont été posées pour nous concerter avec la population dans le cadre du projet Turcot : outils en ligne, consultations publiques, bulletins d’information, comités de bon voisinage et rencontres avec les partenaires, pour n’en nommer que quelques-uns. Dans le cadre de la tenue des comités de bon voisinage, il y a eu plus d’une soixantaine de rencontres ouvertes à toutes et à tous dans les secteurs Notre-Dame-de-Grâce, Westmount, Montréal-Ouest et Sud-Ouest. J’aimerais d’ailleurs mettre en lumière le travail de tous les membres des comités de bon voisinage qui se sont impliqués au cours des dernières années. Ils ont su maintenir un dialogue nécessaire à la bonne marche du projet et contribuer à améliorer la qualité de vie de leurs concitoyens.
«Le projet Turcot représentait une belle occasion de repenser, de renouveler et d’améliorer un ensemble d’éléments de la trame urbaine. Le projet a donc été pensé pour rendre plus fluides les déplacements des usagers de la route, mais aussi pour bonifier le milieu de vie des résidents. Ainsi, nous avons éloigné les structures des maisons et ajouté de nouveaux liens entre les quartiers ainsi que des voies réservées et des pistes cyclables pour favoriser les transports collectifs et actifs.»
Q. Le projet final, qui comporte des bonifications en intégration urbaine et en transport collectif, a été annoncé par le gouvernement de Pauline Marois en 2013. Est-ce que la Ville, à l’époque, en était satisfaite ?
R. À l’époque, le projet final, annoncé par le gouvernement péquiste, s’est attiré quelques critiques. Je pense que c’est tout à fait normal qu’il y en ait eues, puisqu’il s’agissait quand même du plus grand chantier routier du Québec. Le projet Turcot consistait à reconstruire quatre échangeurs (Turcot, Angrignon, De La Vérendrye et Montréal-Ouest) au cœur de la grande métropole. Au total, ce sont 56 structures, dont 3 ponts signature, 145 km de voies routières et 21 km de voies ferrées, qui ont été construites.
Le projet Turcot représentait une belle occasion de repenser, de renouveler et d’améliorer un ensemble d’éléments de la trame urbaine. Le projet a donc été pensé pour rendre plus fluides les déplacements des usagers de la route, mais aussi pour bonifier le milieu de vie des résidents. Ainsi, nous avons éloigné les structures des maisons et ajouté de nouveaux liens entre les quartiers ainsi que des voies réservées et des pistes cyclables pour favoriser les transports collectifs et actifs. Notons également que les structures s’intègrent maintenant de façon beaucoup plus harmonieuse aux quartiers grâce aux aménagements paysagers.
Q. Le projet Turcot a la particularité d’être carboneutre.
R. Il s’agit du premier projet carboneutre du ministère des Transports. Cela signifie que les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées aux activités de construction du projet font l’objet d’une compensation, soit par l’achat de crédit carbone, soit par des projets de plantation. D’ailleurs, les émissions découlant des travaux réalisés par KPH Turcot entre 2015 et 2018 ont déjà été compensées par l’achat de crédit carbone. Le Ministère compensera les émissions liées à la réalisation des travaux en mode traditionnel et a opté pour le reboisement de terrains appartenant au Ministère situés le long du réseau routier dans trois régions : la grande région métropolitaine de Montréal, la Montérégie et la Mauricie.
Turcot : « Il s’agit du premier projet carboneutre du ministère des Transports. Cela signifie que les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées aux activités de construction du projet font l’objet d’une compensation, soit par l’achat de crédit carbone, soit par des projets de plantation. »
Le reboisement des sites choisis devrait être effectué au cours de l’année 2021. Aussi, plus de 80 % des matériaux démantelés ont été revalorisés dans le projet Turcot. À titre d’exemple, le béton et les enrobés bitumineux ont été concassés et incorporés aux nouveaux matériaux qui sont utilisés pour la construction des infrastructures, principalement dans les remblais autoroutiers ainsi que les routes et les autoroutes. Il y a un important effort de verdissement dans le projet Turcot. À terme, ce sont environ 61 000 arbustes, vivaces, graminées et plantes grimpantes, et plus de 9 000 arbres, dont 400 conifères, qui auront été plantés. Le projet Turcot, c’est aussi 31,5 hectares de nouvelle superficie verte, soit l’équivalent de 39 terrains de football.
Le transport en commun
Q. Comment se portent les grands projets structurants de transport en commun dans la région de Montréal ?
R. Les projets de développement du transport collectif demeurent une priorité pour notre gouvernement parce que nous savons que les besoins en mobilité sont criants et qu’ils le seront toujours après la pandémie. Le coût de la congestion ne cesse d’augmenter dans la région de Montréal, et il faut pouvoir offrir des solutions alternatives rapides et efficaces aux citoyens quand ils reprendront leurs habitudes de déplacement. Alors, on garde le cap. C’est la raison pour laquelle ces projets ont été inclus au projet de loi sur la relance présenté par la ministre Sonia LeBel.
Q. Et qu’en est-il des partenaires, la Ville, l’Association régionale de transport métropolitain (ARTM), la Société de transport de Montréal (STM), etc.?
R. Je ne vous cacherai pas qu’elles se sont détendues lorsque nous avons été en mesure d’annoncer l’aide d’urgence, à contribution égale de Québec et d’Ottawa, de 1,2 milliard pour pallier les pertes tarifaires importantes résultant de la chute d’achalandage. Il reste évidemment beaucoup à faire afin de passer à travers les prochaines années, mais nous avons confiance d’y arriver, car nous avons eu jusqu’ici une bonne collaboration avec tout le monde.
Le tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine
Q. Le ministère des Transports a annoncé récemment avoir conclu un contrat de 1,142 milliard de dollars avec le consortium Renouveau La Fontaine pour la réfection du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine. Ce sont des investissements colossaux.
R. La réfection du tunnel ne se limite pas à une simple réparation du béton. Pour être et demeurer fonctionnelle, l’infrastructure compte sur plusieurs systèmes similaires à ceux d’un bâtiment industriel, comme des ventilateurs, des systèmes de pompage et de drainage, des systèmes de surveillance et de télécommunication, etc. Ces systèmes seront tous remplacés ou modernisés. À cela s’ajoutent aussi les travaux de reconstruction de la chaussée de béton de l’autoroute 25, de part et d’autre du tunnel entre la rue Sherbrooke et l’île Charron. La chaussée de béton représente un coût plus important que le bitume, mais cela est nécessaire dans un secteur aussi utilisé par les véhicules lourds. Des travaux de construction de murs antibruit, d’ajout de protection contre les incendies, de réparation de joints et d’enrochement du tunnel font aussi partie des interventions à faire.
Tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine : La construction d’une nouvelle infrastructure aurait été beaucoup plus coûteuse que la réparation du tunnel. Rappelons qu’avec cet investissement, le Ministère vise à prolonger la durée de vie de l’infrastructure d’environ 40 ans.
Il faut également mentionner que, pour ce projet, la construction d’une nouvelle infrastructure aurait été beaucoup plus coûteuse que la réparation du tunnel. Rappelons qu’avec cet investissement, le Ministère vise à prolonger la durée de vie de l’infrastructure d’environ 40 ans. De plus, les projets de réfection d’infrastructures existantes comportent habituellement un volet de gestion de la circulation. Ce sera le cas du projet du tunnel, et cette gestion sera particulièrement complexe en raison du contexte de travail en tunnel. Ce volet représente des coûts importants de planification et de coordination au quotidien ainsi que de mise en place des entraves et des détours, et il comporte d’autres coûts liés aux fermetures (présence policière accrue, escouade d’intervention d’urgence, etc.). À l’inverse, la construction d’une toute nouvelle infrastructure n’a pas autant de contraintes pour le maintien de la circulation.
Finalement, le Ministère a prévu que ces travaux allaient avoir des répercussions importantes sur la circulation. C’est pourquoi une part du budget ira à la construction de nouvelles infrastructures de transport collectif qui pourront être pérennes. On parle, par exemple, de nouveaux quais d’autobus, de 850 nouvelles places de stationnement incitatif et de plus de 25 km de voies préférentielles pour les autobus. ■