MAGAZINE CONSTAS

Photo 3600 et réalité virtuelle pour l’apprentissage sur les chantiers

Le Cégep Limoilou à l’avant-garde

Dossier Constas 
INNOVATION : PROJETS ET PERSPECTIVES

« Je me suis demandé de quelle façon on pourrait explorer les possibilités de cette technologie et l’adapter à nos besoins. Cela m’a tout de suite intéressé de faire, grâce à elle, des visites virtuelles d’un chantier et de mettre en place un suivi de son évolution du début à la fin. » — Jean Tanguay

En 2020, Donavan Gilbert, alors enseignant au Cégep Limoilou (il œuvre maintenant dans le secteur privé), a réalisé, avec le concours notamment du technicien en multimédia Richard Bergeron, un projet pilote qui exploite l’imagerie 3600 et la réalité immersive afin de pouvoir tester leur potentiel pédagogique dans l’enseignement de la technologie du génie industriel. Jean Tanguay, qui enseigne depuis 2004 au Cégep de Limoilou la technologie du génie civil dans les secteurs voirie et gestion de projet, s’en est inspiré.



Par Jean Brindamour

Jean Tanguay enseigne au département de Technologie du génie civil au Cégep Limoilou (Campus de Charlesbourg).

«Le Cégep Limoilou a acquis la technologie d’imagerie 360o il y a plusieurs années, raconte Jean Tanguay. Donavan Gilbert, qui a enseigné durant 2 ou 3 ans au Cégep, fut l’un des premiers à organiser des activités pédagogiques à partir de cette technologie. J’ai été invité par Richard Bergeron – que je connais bien – à aller voir son travail. L’idée de départ de mon côté était de visiter des chantiers en 3D. Avec les étudiants, surtout dans leur première année, on se rend physiquement dans des chantiers. Ce ne sont jamais les mêmes d’une année à l’autre : on prend les chantiers disponibles et on ne peut jamais tout voir. Je me suis demandé de quelle façon on pourrait explorer les possibilités de cette technologie et l’adapter à nos besoins. Cela m’a tout de suite intéressé de faire, grâce à elle, des visites virtuelles d’un chantier et de mettre en place un suivi de son évolution du début à la fin. De tout temps, on s’est rendu dans les chantiers et on a pris des photos, qu’on utilisait partiellement dans nos cours. On prenait 50 photos pour en utiliser deux, rarement bien répertoriées. Chacun des profs avait souvent sa propre banque de photos. L’intention était, pour ainsi dire, de fédérer nos photos et surtout de les fédérer à partir d’une technologie qui nous permet, comme utilisateur et comme observateur, de regarder un objet de tous les côtés. On a réussi à trouver, en automne 2021, un chantier à l’étape des fondations : celui d’un complexe de condos en béton, situé dans le quartier Lebourgneuf, nommé Vert Mezzanine. On a suivi ce chantier pour s’équiper d’une série de photos 360o. Après une première reconnaissance avec Richard Bergeron, car c’est lui qui prend les photos, moi et quelques autres professeurs, nous avons déterminé quelles photos il nous fallait et localisé le lieu où les prendre. Chaque fois qu’on revenait, on retournait exactement au même endroit : l’objectif étant d’avoir toujours le même point de vue pour mieux discerner l’évolution du chantier. On a visité le chantier à cinq reprises, réparties entre la fin du mois de septembre et le début du mois de décembre 2021. On a pu voir les fondations se construire, le bétonnage, la machinerie, une partie de l’excavation également, bref l’évolution du chantier, mais on a aussi obtenu, une chose toujours difficile à acquérir, surtout dans le privé, les plans de construction et de structure. On les a mis sur « SmartUse », une plateforme qu’on utilise depuis quelques années, justement comme une bibliothèque de plans, accessible aux étudiants. Aux plans de Vert Mezzanine, se sont ajoutés des hyperliens qui donnent accès aux photos 360o. »

« La prochaine étape sera de trouver d’autres ouvrages qui donneraient accès aux plans et aux chantiers de construction à leur début. Cela nous permettra de bâtir une banque de données de plus en plus riche. (…) On pourra y voir comment les excavations se font, la machinerie en action, les méthodes de travail, toutes les étapes d’un chantier, ce qui rendra l’expérience encore plus concrète. » — Jean Tanguay

Mise à plat d’un cliché 3600 sur l’un des chantiers où Ogesco est maître d’œuvre et qui sert à des fins académiques au Cégep Limoilou, dans les classes de Jean Tanguay. Le cliché 3600 a été pris le 7 décembre 2021 sur le chantier du bâtiment résidentiel Vert Mezzanine (le promoteur est Immeubles Simard et le maître d’œuvre est Ogesco). On peut y voir la construction des fondations ainsi que du premier étage (structure en béton). CR : Richard Bergeron (Cégep Limoilou)


« Vert Mezzanine a donc été notre petit laboratoire, poursuit Jean Tremblay. La prochaine étape sera de trouver d’autres ouvrages qui donneraient accès aux plans et aux chantiers de construction à leur début. Cela nous permettra de bâtir une banque de données de plus en plus riche. Le chantier ne doit pas durer trop longtemps, pour qu’on puisse le suivre du début à la fin en quelques mois. La réfection d’une rue d’une intersection à une autre est un bon exemple. Ce type de chantier dure un été, trois ou quatre mois au maximum. On pourra y voir comment les excavations se font, la machinerie en action, les méthodes de travail, toutes les étapes d’un chantier, ce qui rendra l’expérience encore plus concrète. »



Prochaine étape, la réalité immersive ?

Jean Tanguay n’en est pas encore à l’utilisation de casques ou de lunettes de réalité virtuelle. « On y songe. Mais en réalité, ce n’est pas nécessaire. À partir du moment où on a accès à des photos 360o, on peut les consulter sur n’importe quel appareil et tourner l’image comme on veut; on peut même les consulter sur un téléphone cellulaire. L’immersion correspondrait un peu à ce que Donavan Gilbert a fait. L’étudiant avec la lunette voit non seulement le chantier, mais des panneaux, ajoutés virtuellement, qui lui donnent une indication ou lui posent une question à laquelle il doit répondre. Pour se rendre là, il faudrait créer des espèces de scénarios, ce qui exige du temps. Pour l’instant, on se limite à prendre des photos 360o et à les déposer dans un lieu consultable pour tout le monde. »

Jean Tanguay ne voit que des avantages à ces nouvelles technologies : « Elles nous ouvrent une porte qui était relativement fermée. On était limité par le passé à des photos statiques, cadrées. Ces photos 360o obligent l’étudiant à observer et à essayer de comprendre l’espace par rapport à la vue d’un plan dessiné sur une feuille de papier. C’est un gros plus. » ■