Marketing RH et marque employeur 3.0
Des ressources plus humaines
« Pendant longtemps les entreprises ont priorisé l’expérience client. Il leur faut maintenant développer l’expérience employeur », affirme Patrick Lespérance.
Qui aurait cru, il y a quelques années à peine, qu’en 2021-2022, on parlerait d’accueil, d’intégration, d’inclusion, de diversité, de culture d’organisation et même de santé mentale dans l’industrie de la construction ? La notion de marque-employeur entre déjà dans l’ère du 3.0 et pousse les employeurs à innover et concevoir leurs ressources humaines en termes de marketing. Directeur marketing principal de l’agence de communication Sept24, Patrick Lespérance fait le point sur les cinq tendances à venir dans ce domaine lors de son atelier au 77e Congrès.
par Michel Joanny-Furtin
« Nous estimons qu’en 2021, près de 30 à 35% des rotations du personnel des entreprises se font dans les 30 jours d’une embauche », affirme-t-il. Un pourcentage qui, selon lui, s’aggrave avec la distanciation sociale et l’impatience grandissante de la nouvelle génération. « Qu’il soit question de santé, de consommation ou de ressources, la réalité actuelle, conséquente à la pandémie de coronavirus, est éprouvante parce qu’elle relativise les projets de tous et chacun. La simple question de rester au sein d’une entreprise ou d’aller voir ailleurs est devenue cruciale. »
Patrick Lespérance pense que les employés tiennent en quelque sorte le gros bout du bâton dans le contexte de la reprise exponentielle de l’activité économique, parce qu’ils peuvent choisir – et changer – d’employeur. Et les entreprises craignent cette tendance qui pourrait éloigner leurs meilleures recrues : « L’industrie de la construction est un domaine d’activité où l’on peut changer d’employeur aisément. Les employés ont beau jeu de magasiner une job. Nonobstant l’attitude des employeurs pendant la pandémie, rien n’est acquis quant à la reconnaissance de l’employé », explique-t-il. « Les contrats, dans le monde de la construction notamment, affluent à un rythme fou. La rétention du personnel, surtout s’il est qualifié, devient un véritable enjeu. »
La culture de chaque entreprise induit une nouvelle approche en humanisant son organisation. « Pendant longtemps les entreprises ont priorisé l’expérience client. Il leur faut maintenant développer l’expérience employeur, créer un sentiment d’appartenance. L’employeur doit donner de l’importance au nouvel employé dès son arrivée mais aussi dans son quotidien dans l’entreprise. Un employé bien intégré, bien formé fera moins d’erreurs. Il y aura moins de retards et moins de tensions au sein de l’entreprise », avance Patrick Lespérance.
Simplifier et responsabiliser
Et les recettes simples, sans contraintes de temps ou d’argent pour les employeurs, ne manquent pas, comme trouver un point d’intérêt commun, laisser à l’employé le choix de son responsable d’intégration, échanger quelques minutes chaque jour plutôt qu’une lourde réunion mensuelle, simplifier à une page les manuels, les politiques, les procédures : « Il ne s’agit pas de changer les règlements concernant la santé et la sécurité au travail mais de les rendre plus faciles et plus légers, plus accessibles », pense le directeur marketing.
« Les contrats, dans le monde de la construction notamment, affluent à un rythme fou. La rétention du personnel, surtout s’il est qualifié, devient un véritable enjeu », rappelle
le spécialiste.
Il ajoute qu’il faut également « partager les valeurs d’entreprise comme une référence, viser la responsabilisation et l’autonomie des employés, mais aussi leur imputabilité. Il sera nécessaire de repenser la forme et le fond des formations; de simplifier les communications au profit d’une information interne plus brève, en utilisant les textos par exemple pour une communication plus légère… »
Enfin, reconnaître et célébrer ! « L’employeur devra être à l’écoute des idées, des initiatives de ses employés. Il doit faire preuve d’empathie, mettre les deux pieds dans les bottines de ses collaborateurs, se mettre dans leur peau… »
De la PVM vers la PVE
Patrick Lespérance aborde la Proposition valeur marque (PVM) par rapport à la Proposition valeur employé (PVE) : « En développant un sentiment d’appartenance, les employés deviennent des ambassadeurs qui, via les ressources humaines, déclinent l’image de marque de l’entreprise pour atteindre l’expérience-client. »
Le directeur marketing en développement des affaires est tout à fait conscient que cela demandera aux employeurs une réelle agilité dans les prochaines années.
Les recettes simples, sans contraintes de temps ou d’argent pour les employeurs, ne manquent pas comme trouver un point d’intérêt commun, laisser à l’employé le choix de son responsable d’intégration, échanger quelques minutes chaque jour plutôt qu’une lourde réunion mensuelle, simplifier à une page les manuels, les politiques, les procédures.
« On doit déjà imaginer l’avenir sans masques. Près de 40 % des entreprises n’ont pas de solution de rechange face aux arrêts de travail et aux départs volontaires ou non. La rétention du personnel se joue désormais sur d’autres approches que les salaires, les barèmes, les règlements, les cartes professionnelles, etc. Les politiques de diversité, d’inclusion et d’intégration deviennent primordiales, soutient le directeur marketing de Sept24. Non seulement le travail doit être accessible à tout le monde mais, aujourd’hui plus que jamais, une entreprise ne peut se passer d’aucun candidat.»
« Un taux de roulement plus haut que 20 % pénalise le budget des entreprises. N’oublions pas qu’en termes de publication et d’affichage de postes, de formations et de mise à niveau, de conseil en recrutement, de matériel professionnel individualisé, etc., l’embauche d’un nouvel employé coûte de 0,5 à 3 fois le salaire de cet employé… ». ■