MAGAZINE CONSTAS

Surélévation du pont Marc-Trudel à Shawinigan

Un mètre qui change tout

Livré plusieurs semaines avant l’échéance, le pont Marc-Trudel offre désormais quatre voies. S’y ajoutent une piste cyclable multifonctionnelle sur la voie est (côté barrage), et un trottoir sur la voie ouest (en aval).

Situé sur la route 157, le pont Marc-Trudel enjambe la rivière Saint-Maurice et relie les quartiers nord et sud de Shawinigan. Ce pont en milieu urbain est une voie d’accès névralgique pour la ville et ses environs. Or, la structure avait atteint sa fin de vie utile. La solution était la reconstruction complète. Lors de sa conception, un rehaussement s’est avéré nécessaire en fonction des nouvelles normes et de la situation. Résultat : deux ans de chantier et une livraison avant l’échéance prévue !

par Michel Joanny-Furtin

La structure initiale a été bâtie en 1951, puis élargie en 1964. Afin de préserver la pérennité de l’ouvrage d’art, une première limitation des charges à 28, 36 et 44 tonnes a été instaurée en 2016. Puis à 22, 30 et 32 tonnes en 2018.

« On a connu que très rarement des crues exceptionnelles dans les dernières décennies. Mais il fallait envisager un espace d’écoulement nécessaire pour une possible crue historique comme celle de 2017 où l’eau effleura le haut de la pile mais sans atteindre le tablier du pont », raconte Roxanne Pellerin, conseillère en communication à la Direction régionale du ministère des Transports du Québec.



Surélever le pont s’est révélé nécessaire pour correspondre aux normes actuelles exigeant un dégagement minimal de 1 mètre par rapport au niveau maximal de l’eau lors de l’ouverture de l’ensemble des vannes du barrage d’Almaville. En effet, « un évacuateur de crues, géré par Hydro-Québec à proximité du pont, contrôle le débit de la rivière, rappelle Roxanne Pellerin. Les ingénieurs ont donc calculé le débit maximum de la rivière Saint-Maurice en y ajoutant une marge de sécurité en cas de crue exceptionnelle en dessous du pont lorsque les vannes d’Hydro-Québec sont ouvertes. »

La nouvelle hauteur a également été déterminée en tenant compte de la densité des activités voisines, des changements climatiques et de l’augmentation des précipitations et des crues ordinaires depuis quelques années.

La circulation continue pendant les travaux

Mais il fallait maintenir la circulation dans ce site névralgique de l’agglomération, et notamment vers les sites à vocation récréotouristique situés à proximité du pont, comme la Cité de l’Énergie, le site d’Arbre en arbre et l’ensemble de l’île Melville. Une déviation était difficilement envisageable : la circulation sur le pont affiche en effet un débit moyen annuel (DMA) de 21 700 véhicules dont 3% de véhicules lourds.

Surélever le pont s’est révélé nécessaire pour correspondre aux normes actuelles exigeant un dégagement minimal de 1 mètre par rapport au niveau maximal de l’eau lors de l’ouverture de l’ensemble des vannes du barrage d’Almaville.

Afin d’éviter la fermeture du site et conserver l’accès à l’autre rive, le projet a été bâti en deux grandes phases. Ainsi, une première moitié du pont à l’ouest fut démolie puis reconstruite avec des poutres métalliques pendant l’année 2019. Ce côté fut choisi en priorité parce que plusieurs services (électricité, téléphonie, câblages divers, etc.) étaient en fonction sous le tablier est. Une fois le pont ouest reconstruit et les services transférés, la circulation fut alors déviée en décembre 2019. Les limites de charges ont alors été abolies lors de ce transfert.


L’importance de la diffusion de l’information

La collaboration avec les partenaires (entreprises, réseau scolaire, médias locaux, police, etc.) est une solution gagnante. Un comité de gestion de la circulation pour étudier et résoudre les problèmes de congestion routière a mis en place plusieurs procédures pour informer les usagers sur l’évolution des travaux, leurs horaires, proposer des chemins alternatifs et mettre à jour en temps réel le 511. « On a ajouté des signaleurs lors de certaines étapes en alternance, indique Roxanne Pellerin, et des feux de circulation en fonction pendant la saison hivernale pour permettre les opérations de déneigement. Les congestions, au début des travaux, se sont ainsi vite résorbées. »

Pont Marc-Trudel. Désormais, un double pilier central en T porte le nouveau pont Marc-Trudel. CR: Ministère des Transports, direction Mauricie

Un chantier majeur sur un lien unique

Le ministère des Transports entreprit ensuite la démolition puis la reconstruction de la partie est de la structure au cours de l’année 2020. À l’origine, deux piliers oblongs soutenaient la structure à 3 travées. Désormais, un double pilier central en T porte ce nouveau pont Marc-Trudel à 2 travées bâti par l’entreprise Grandmont & Fils, à Drummondville, au coût de 12,4 millions.



Le pont offre désormais quatre voies, soit deux voies dans chaque direction. S’y ajoutent une piste multifonctionnelle sur la voie est (côté barrage), qui rejoint une piste cyclable déjà présente, et un trottoir sur la voie ouest (côté aval), lequel relie l’île Melville et les sentiers du parc des Chutes.

Il favorise le transport actif des cyclistes et des piétons, ainsi que les moyens de transport électriques individuels, tels les fauteuils motorisés.


Des conducteurs courtois

« Les usagers de la route ont collaboré au-delà de nos espérances, commente Roxanne Pellerin, puisque, très courtois, ils n’osaient pas prendre la voie latérale menant au rétrécissement de la voie de circulation. Nous avons dû installer des panneaux à messages variables pour les sensibiliser afin de limiter la longueur de la congestion. Comme quoi les gens de Shawinigan sont des conducteurs courtois ! »

En plus de ce chantier de rehaussement de 1 mètre, il a fallu corriger le profil des chaussées pour fluidifier le confort de roulement sur 50 mètres du côté sud et sur 100 mètres du côté nord selon une vitesse autorisée à 70 km/h.

« Un resurfaçage fut également mis en place sur 500 mètres jusqu’au pont suivant, le pont René-Hamel », conclut Roxanne Pellerin. « Il s’agit d’une reconstruction complète qui remplace désormais l’ancienne structure. Si l’ancien pont faisait 101,1 mètres de long, le nouveau affiche une longueur de 95,8 m. La largeur de 21,4 m se distribue en un trottoir de 2,25 m, quatre voies de 3,5 m, deux accotements de 0,5 m et une piste multifonctionnelle de 4,15 m. Les cylindres du pilier central ont une hauteur de 7,2 m au-dessus de l’eau. »

Le projet de surélévation a commencé en décembre 2018 et le marquage final de la chaussée s’est fait le 29 octobre 2020. Le nouveau pont Marc-Trudel fut inauguré le 30 octobre dernier, soit plusieurs semaines avant l’échéancier. ■


Marc Trudel

Qui était Marc Trudel ? (Sainte-Geneviève-de-Batiscan, 1896 – Shawinigan, 1961.)

Fils de cultivateur, Marc-Napoléon Trudel étudie la médecine à l’Université de Montréal puis pratique à Shawinigan dès 1923 dans les hôpitaux Joyce et Sainte-Thérèse. Il présidera le Collège des médecins du Québec de 1946 à 1961. Député de l’Action libérale nationale (ALN) dès 1935, il rejoint l’Union nationale en 1936. Il est président de l’Assemblée législative de 1936 à 1939. Défait cette année-là, il est réélu en 1944 et 1948. Ministre sans portefeuille dans le second gouvernement Duplessis (1944) il est défait en 1952, mais préside alors la Commission du salaire minimum.