MAGAZINE CONSTAS

Assurer une meilleure gestion des eaux de pluie

Montréal mise avec succès sur les ouvrages de rétention à grande échelle

Dossier Constas 
INNOVATION : PROJETS ET PERSPECTIVES

La conception des réservoirs souterrains de rétention des eaux pluviales comporte d’importants défis pour les ingénieurs. « Avant même de débuter leur construction, il faut procéder à des études géotechniques pour évaluer les propriétés du sol et adapter la conception en conséquence. » — Kim Nantais Desormiers, de la Ville de Montréal

Sur l’île de Montréal, faire une meilleure gestion des eaux de pluie, en les retenant dans des réservoirs et en les libérant au moment opportun est essentiel afin de permettre à la station d’épuration Jean-R.-Marcotte, à l’extrémité est de l’île, de faire plus librement son travail.

Par Stéphane Gagné

Lors de fortes pluies sur l’île de Montréal, un scénario se répète souvent. Une part importante du réseau d’égout (60 %) qui recueille à la fois les eaux de pluie et les eaux usées se retrouve à la station d’épuration. Des surverses peuvent alors survenir et ces eaux sont rejetées dans le fleuve, sans traitement.

Ouvrage Lavigne 2. L’ouvrage Lavigne, en service depuis 2022. CR : Direction de l’épuration des eaux usées / Service de l’eau, Ville de Montréal

 

La Ville de Montréal, bien consciente de ce problème, s’y attaque depuis quelques années en construisant des ouvrages de rétention souterrains, répartis à plusieurs endroits sur son territoire. Le plus important, appelé Rockfield, sera en fonction cette année et contiendra 45 000 mètres cubes d’eau, soit un volume équivalant à 18 piscines olympiques d’une profondeur de deux mètres.



Plusieurs ouvrages sur le territoire

Mis à part l’ouvrage Rockfield, il en existe plusieurs autres. Les plus importants en termes de capacité sont l’ouvrage Chester (29 700 m3), le Lavigne (23 000 m3), le Charles-Renard (22 700 m3), le 71e av (7000 m3) et le Marc-Aurèle-Fortin (4 000 m3). Il faut ajouter à cela, le William (8 000m3) qui sera mis en service cette année. D’autres sont présentement à l’étude comme l’ouvrage Turcot (31000m3) et l’ouvrage Saint-Jacques (15 000 m3). D’autres ouvrages de rétention, de plus petites dimensions, sont aussi présents sur des terrains privés ou publics, la plupart du temps non souterrains. La rétention des eaux pluviales se fait ainsi de diverses façons. Cela peut être sous la forme de pavés alvéolés, de pavés perméables, de bassins de biorétention (qui interceptent et retiennent les eaux de ruissellement en provenance de stationnements ou de chaussées), de marais filtrants, de saillies drainantes, de jardins de pluie, etc. On commence à voir apparaître ce genre d’aménagements un peu partout en ville. Ainsi, lorsque la Ville a refait la rue Papineau, le long du parc Frédéric-Back, un bassin de biorétention a été aménagé entre le trottoir et la rue afin de retenir les eaux de pluie.

Ouvrage Rockfield. L’ouvrage Rockfield, ici en construction, se trouve dans l’arrondissement Lasalle-Lachine. Il sera en service cette année. CR : Direction de l’épuration des eaux usées / Service de l’eau, Ville de Montréal

 

À quoi servent ces ouvrages ?

Au départ, les ouvrages de rétention des eaux pluviales servent à collecter, stocker et gérer le surplus d’eau que nos réseaux d’égout ne peuvent véhiculer lors de fortes précipitations. Ils sont utiles pour atténuer le phénomène de débordement qui peut survenir alors à la station d’épuration et les risques de surverses de ces eaux, non traitées, dans le fleuve.



Limiter ce phénomène est aussi nécessaire dans le secteur résidentiel. Le règlement 20-030 de la Ville, entré en vigueur le 22 juin 2020, exige que les nouvelles constructions ou les agrandissements sur des installations comprenant des surfaces imperméables de plus de 1000 mètres carrés doivent être dotés de systèmes de rétention et de gestion des eaux pluviales. Cette obligation s’applique aussi aux rénovations.

Un défi de génie civil

La conception des réservoirs souterrains de rétention des eaux pluviales comporte d’importants défis pour les ingénieurs. « Avant même de débuter leur construction, il faut procéder à des études géotechniques pour évaluer les propriétés du sol et adapter la conception en conséquence, dit Kim Nantais Desormiers, relationniste média à la Ville de Montréal. La présence d’infrastructures existantes à proximité doit également être considérée, car elle peut limiter les possibilités de localisation optimale de l’ouvrage. Enfin, il faut vérifier le niveau de la nappe phréatique afin de faire la gestion adéquate des eaux souterraines lors de l’excavation. »

Ouvrage Lavigne 3. L’ouvrage Lavigne, en service depuis 2022. CR : Direction de l’épuration des eaux usées / Service de l’eau, Ville de Montréal

 

L’étape de construction de ces ouvrages comprend aussi son lot de défis. « Ils exigent de profondes excavations, dit Kim Nantais Desormiers. S’y ajoutent la conception structurale des parois de béton et la nécessité d’étanchéiser le réservoir, l’installation de déversoirs et de vannes modulantes à son entrée et à sa sortie afin d’assurer une bonne gestion des eaux et un bon entretien de l’ouvrage, une fois les travaux complétés. Il faudra notamment assurer le contrôle des sédiments et des débris dans le réservoir pour préserver sa capacité de stockage et assurer son bon fonctionnement, afin d’éviter les blocages. » ■