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Nouveau président de l’ACC

La vision de Rodrigue Gilbert pour bâtir un meilleur Canada

Rodrigue Gilbert est entré en poste à titre de président de l’Association canadienne de la construction (ACC) au début du mois de mai. Avec plus de six ans d’expérience au sein de l’organisation, il est le premier Québécois à prendre les rênes de cette association qui veut bâtir un meilleur Canada.

par Mariève Paradis

 

 

Pont Samuel-De Champlain, Montréal
Pont Samuel-De Champlain, Montréal. Photo : Infrastructure canada

Rodrigue Gilbert succède ainsi à Mary Van Buren qui a joué un rôle crucial dans la transformation de l’organisation. Sous la direction de cette dernière, l’Association canadienne de la construction (ACC) a restructuré sa gouvernance et renforcé ses relations avec le gouvernement et le public. « Elle a fait un travail fantastique et a été une mentore pour moi », ajoute Rodrigue Gilbert, remerciant sa prédécesseure.

Une vision d’avenir

Rodrigue Gilbert se fixe des objectifs ambitieux pour son mandat à la tête de l’ACC. Parmi ses priorités figurent la modernisation des processus d’approvisionnement, le développement de la main-d’œuvre et une infrastructure durable à long terme, en plus d’augmenter la visibilité de l’Association auprès des gouvernements. « On est efficaces et on veut l’être encore plus », affirme-t-il avec aplomb.

Rodrigue Gilbert envisage un Canada meilleur pour les 25 à 30 prochaines années, avec un plan stratégique visant à sortir des cycles d’investissement électoraux à court terme et plutôt à viser des décisions d’infrastructures à long terme. « Il faut penser à long terme et prendre des décisions basées sur des infrastructures durables. Si l’enjeu de l’habitation est sur toutes les lèvres en ce moment, il ne faut pas oublier les infrastructures essentielles qui soutiendront ces nouvelles résidences », prévient le président de l’ACC.

train du REM
Le train du REM et sa première traversée du pont Samuel-De Champlain en juillet 2022. Photo : JF Savaria
Rodrigue Gilbert
Rodrigue Gilbert, président de l’Association canadienne de la construction. Photo : ACC

 

 

 

 

 

 

 

Vieillissement des infrastructures

Le vieillissement des infrastructures est un enjeu critique au Canada, particulièrement au Québec. « L’investissement dans des infrastructures telles que nos égouts et nos routes est souvent négligé, car ils ne sont pas considérés comme des annonces politiquement attrayantes. Pourtant, ils sont essentiels pour soutenir les projets de construction résidentielle », affirme Rodrigue Gilbert.

Le manque d’infrastructures adéquates pour accompagner la densification urbaine pose des défis importants. Il donne l’exemple de Vancouver, une ville dans laquelle les infrastructures ne suivent pas le rythme des nouvelles constructions de bâtiments multilogements, où se trouvaient des maisons unifamiliales auparavant, ce qui crée des problèmes de durabilité et d’efficacité.

Il faut cesser de prendre des décisions en fonction des cycles électoraux et penser à long terme pour l’investissement dans les infrastructures.

– Rodrigue Gilbert, Association canadienne de la construction

 


 

 


 

Infrastructure durable et progrès technologique

Le président de l’ACC insiste sur l’importance de construire de manière progressive et durable. L’ACC publiera un nouveau rapport mettant en avant les priorités de l’industrie pour une construction plus écologique. « Nous avons des données sur la construction durable. Il y a beaucoup de recherche dans la construction des routes en lien avec les changements climatiques. Il faut intégrer ces connaissances dans l’industrie. Pour ce faire, il faut pouvoir innover dans la façon de livrer les projets », pense-t-il.

Selon lui, les entrepreneurs sont déjà conscients de ces enjeux et cherchent à innover constamment. Les nouvelles méthodes de livraison des projets, comme le mode de livraison intégré, sont en plein développement, et le Québec s’oriente vers celles-ci. Il est indispensable, selon Rodrigue Gilbert, que les entrepreneurs gardent une longueur d’avance et innovent plutôt que de se laisser dicter par les gouvernements comment construire.

Modernisation des processus d’approvisionnement

Une des réformes majeures que Rodrigue Gilbert souhaite soutenir est l’adoption d’appels d’offres basés sur la collaboration et la valeur ajoutée des projets, non pas uniquement sur le plus bas soumissionnaire. Il fait valoir que cette approche favori­serait l’innovation et permettrait l’utilisation de matériaux et de méthodes de construction innovantes. « En faisant participer les entrepreneurs dès les premières phases de projet et en partageant les risques, le secteur pourrait améliorer de façon importante la qualité des constructions tout en restant compétitif », affirme-t-il.

Pour Rodrigue Gilbert, la clé du succès réside dans la collaboration et la communication entre toutes les parties prenantes de l’industrie de la construction. « Aucun projet ne peut être réalisé sans la participation de divers secteurs civils, et il est crucial que ces différents acteurs travaillent ensemble à des objectifs communs », croit le président de l’ACC.

Aucun projet ne peut être réalisé sans la participation de divers secteurs civils, et il est crucial que ces différents acteurs travaillent ensemble à des objectifs communs.

— Rodrigue Gilbert, Association canadienne de la construction

congrès, ACRGTQ
Lors de son dernier congrès, l’ACRGTQ présentait une conférence sur les modes collaboratifs. De gauche à droite : Guy Paquin, alors directeur général — direction générale des stratégies et des projets spéciaux, Société québécoise des infrastructures ; Robert Villeneuve, directeur général de l’encadrement des marchés publics, Secrétariat du Conseil du trésor ; Sébastien Marcoux, directeur conception-construction et vice-président, Construction Kiewit ; Francis Boivin, directeur général — direction générale de la gestion des projets routiers et de l’encadrement en exploitation, ministère des Transports et de la Mobilité durable du Québec ; Karina Lehoux, présidente fondatrice et animatrice professionnelle, Eklosion. Photo : Normand Huberdeau, Groupe NH Photographes

 

Développement de la main-d’œuvre

Le défi de la main-d’œuvre reste un enjeu majeur pour Rodrigue Gilbert. « Le Canada fait face à un grave déficit de main-d’œuvre dans le secteur de la construction, avec un besoin estimé à 350 000 travailleurs dans la prochaine décennie », souligne-t-il. Pour relever ce défi, il propose de réviser les modèles actuels d’immigration afin d’attirer une main-d’œuvre qualifiée. Il met l’accent sur la nécessité de collaborations entre les divers organismes gouvernementaux et l’ACC pour s’assurer que les politiques d’immigration correspondent aux besoins spécifiques du secteur de la construction.

Offensive formation en construction
Lancement de l’Offensive formation en construction (octobre 2023) par le gouvernement du Québec afin de faciliter la formation dans les écoles et le recrutement sur les chantiers de 5000 travailleurs. Photo : Cabinet du premier ministre

Il croit aussi qu’en changeant la perception du public envers l’industrie de la construction, davantage de jeunes investiront le marché de l’emploi dans ce domaine. « Le milieu de la construction a beaucoup changé depuis les années 1970. Les entreprises ont investi énormément dans la santé et la sécurité au travail ; il faut que cela soit reconnu », mentionne Rodrigue Gilbert.

Il croit aussi que la stratégie qui consiste à s’adresser aux parents permet à des jeunes de se tourner vers le milieu de la construction. « Je sais, j’ai deux enfants, et les parents ont une influence sur les choix de carrière de leurs enfants », explique le père de famille. En mettant en avant les possibilités de participer à des projets significatifs et de contribuer à des changements sociaux, Rodrigue Gilbert espère attirer plus de jeunes talents vers l’industrie de la construction.

En faisant participer les entrepreneurs dès les premières phases de projet et en partageant les risques, le secteur pourrait améliorer de façon importante la qualité des constructions tout en restant compétitif .

— Rodrigue Gilbert, Association canadienne de la construction

 


 

 


 

L’unicité du Québec

Si Rodrigue Gilbert constate que les enjeux sont similaires partout au Canada, les yeux de l’industrie de la construction canadienne se tournent vers le Québec pour certains aspects.

Le projet de loi no 51, adopté en mai, viendra changer certaines restrictions en ce qui concerne la mobilité de la main-d’œuvre. L’ACC voit ce changement comme une bonne nouvelle. « Les restrictions de corps de métiers sont beaucoup plus sévères au Québec. Avec ces changements, on pourra voir une amélioration dans la vitesse à laquelle on livre les projets », admet-il.

D’ailleurs, Rodrigue Gilbert se réjouit d’une autre avancée du Québec, celle de la création de Mobilité Infra Québec et de l’approche collaborative du contrat de partenariat, deux projets de loi déposés récemment à l’Assemblée nationale. Il est ravi de voir que le gouvernement inclut de plus en plus les entrepreneurs dans les phases initiales des projets, ce qui facilite une meilleure coordination et une exécution plus efficace. « Le fait que le Québec veuille aller vers un mode de livraison intégré est une très bonne nouvelle. On reste prudents puisque les détails n’ont pas encore été convenus, mais en concept, c’est un grand pas dans la bonne direction », nuance le président de l’ACC.

Le fait que le Québec veut aller vers un mode de livraison intégré est une très bonne nouvelle.

— Rodrigue Gilbert, Association canadienne de la construction

Rodrigue Gilbert tenait à mentionner le duo de Québécois à la tête de l’Association canadienne de la construction. En effet, Francis Roy, tout récemment nommé président du conseil d’administration, apporte, lui aussi, une perspective bilingue et une compréhension approfondie des défis et des opportunités du secteur de la construction au Canada. « Nous avons une association forte pour gagner en efficacité », conclut-il. ■

 


 

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