MAGAZINE CONSTAS

Recruter à l’international

Entrevue avec Marie‑Josée Chouinard, vice-présidente Talents internationaux et investissements étrangers chez Québec International

Recruter à l’étranger peut sembler une montagne pour beaucoup d’employeurs. Mais avec une bonne planification et un accompagnement spécialisé, ce peut être la façon de pourvoir un poste vacant depuis des mois ! Marie-Josée Chouinard, vice‑présidente Talents internationaux et investissements étrangers chez Québec International, explique comment les entreprises se préparent pour engager des travailleurs à l’international.

par Mariève Paradis

 

 

Dès 2018, la pénurie de main-d’œuvre s’observait dans le milieu de la construction. Malgré des actions constantes, le recrutement reste difficile, notamment pour la main-d’œuvre spécialisée et qualifiée. « La construction est une priorité du gouvernement pour le recrutement international. De plus en plus d’entreprises dans le domaine de la construction participent à nos missions », mentionne d’emblée Marie-Josée Chouinard.

Se préparer à recruter à l’étranger

L’équipe de Marie-Josée Chouinard accompagne les entreprises qui souhaitent recruter à l’international. « Nous aidons les entreprises dans leurs démarches, ce qui inclut du coaching et de la formation en ressources humaines ainsi que l’adaptation aux meilleures pratiques d’intégration et d’accueil des nouveaux arrivants. »

Cet accompagnement vise à garantir le succès de la mobilité internationale. « Les entreprises doivent être à la fine pointe des bonnes pratiques d’intégration pour attirer et retenir des talents internationaux », affirme la vice-présidente de l’agence de développement économique, soulignant l’importance de la préparation pour garder cette main-d’œuvre au Québec à long terme.

La construction est une priorité du gouvernement pour le recrutement international. De plus en plus d’entreprises dans le domaine de la construction participent à nos missions.

— Marie-Josée Chouinard, Québec International

Marie-Josee Chouinard
Marie‑Josée Chouinard, vice-présidente Talents internationaux et investissements étrangers chez Québec International. Photo : Québec International

Les obligations de l’employeur

Pour obtenir un permis de travail pour un travailleur étranger, une entreprise doit d’abord obtenir une évaluation de l’impact sur le marché du travail (EIMT). Cette analyse permet de confirmer la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur. L’em­ployeur doit démontrer qu’il a tenté d’embaucher localement avec un salaire concurrentiel et des conditions de travail compétitives.

« Habituellement, on demande l’EIMT lorsque l’entreprise a déjà un candidat en vue », explique Marie-Josée Chouinard. Elle rappelle que certains types d’emploi n’ont pas besoin de cette preuve de pénurie. En effet, la Liste des professions admissibles au traitement simplifié identifie des professions en prenant en compte les besoins de main-d’œuvre de toutes les régions du Québec. Mise à jour en février chaque année, cette liste est utilisée dans les cas d’embauche de salariés.

Les ordres sont capables d’identifier les diplômes reconnus à l’étranger. Il y a aussi des accords de réciprocité avec certains pays où l’analyse est faite préalablement .

— Marie-Josée Chouinard, Québec International

Cette première étape peut prendre entre 3 et 12 mois (de 6 à 9 mois en moyenne). De son côté, le travailleur doit obtenir un Certificat d’acceptation du Québec, après avoir répondu à des questionnaires éliminant des enjeux de sécurité nationale, par exemple. Le permis de travail obtenu de cette façon lie l’employeur et le salarié pour une période déterminée, d’un maximum de trois ans.

 

Une fois le permis de travail obtenu, l’employeur doit respecter ses obligations :

— Les tâches doivent refléter celles précisées dans l’offre d’emploi et l’analyse de l’EIMT ;
— Le salaire déclaré doit être versé ;
— Le nombre d’heures mentionné doit être travaillé ;
— Les obligations spécifiques liées au volet du Programme des travailleurs étrangers temporaires doivent être respectées ;
— Si le poste est syndiqué, les mêmes conditions de travail prévues à la convention collective doivent être appliquées ;
— Le travailleur étranger a les mêmes droits et obligations en matière de travail que l’ensemble des travailleurs du Québec
— L’employeur doit respecter les mêmes droits et obligations qu’envers les autres membres de son personnel.

Si, lors d’une inspection, ces critères ne sont pas respectés, l’employeur pourrait être assujetti à des sanctions de non-conformité.

 

La conformité de l’employeur en matière d’immigration

Pour assurer la conformité de l’employeur, celui-ci doit respecter le contrat de travail : tâches, salaire, heures, conditions de travail, etc. Même une promotion peut avoir des répercussions sur la conformité de l’employeur. L’entreprise ne doit pas être en gestion de conflit de travail.

Recruter un employé membre d’un ordre professionnel peut aussi ajouter une complexité supplémentaire à la conformité. « Les ordres sont capables d’identifier les diplômes reconnus à l’étranger. Il y a aussi des accords de réciprocité avec certains pays, où l’analyse est faite préalablement », explique Marie-Josée Chouinard. Elle suggère de consulter les ordres professionnels afin de déterminer les pays où les diplômes sont plus susceptibles d’être conformes à l’obtention d’un permis de pratique au Québec. « Certains ordres professionnels peuvent exiger une mise à niveau pour que l’employé puisse pratiquer sa profession au Québec », ajoute-t-elle.

Si le salaire du travailleur est en deçà de 27,47 $ l’heure, salaire médian au Québec, l’employeur doit aussi remplir des conditions particulières comme payer le billet d’avion ou trou­ver un logement abordable, par exemple. Habituellement, l’em­ployeur aide également les conjoints à obtenir un permis de travail ouvert.

Malgré l’énergie et le temps considérables nécessaires à cette démarche, le rendement du capital investi est intéressant selon Marie‑Josée Chouinard. « Les travailleurs internationaux appor­tent des connaissances techniques et favorisent le transfert d’innovation. Ils se montrent loyaux et engagés, ce qui renforce la compétitivité des entreprises québécoises. » ■