MAGAZINE CONSTAS

Gestion des actifs dans les petites municipalités

Le Centre d’expertise et de recherche en infrastructures urbaines (CERIU) propose un nouvel outil

Dossier Constas
Régions, municipalités et infrastructures

Le CERIU a élaboré un projet de capsules vidéo dans lesquelles sept élus et gestionnaires de municipalités québécoises font part de leurs expériences et de leurs conseils.

Le réseau routier, les conduites sanitaires et pluviales, l’usine de traitement des eaux, les bâtiments administratifs… Ce ne sont là qu’une partie des actifs que possède une municipalité et sur lesquels elle s’appuie pour offrir des services à sa population. En faire une saine gestion représente un grand défi, particulièrement pour les petites municipalités qui n’ont pas toujours les ressources ni l’expertise pour en faire l’inventaire et se doter d’une routine de maintenance. Un nouvel outil vient à leur rescousse.

Par Sylvie Lemieux

Marie-Élaine Desbiens, Ingénieure, consultante sur la gestion d’actifs et collaboratrice du CERIU. CR : CERIU

Quels actifs traiter en priorité ? Que doit inclure une politique de gestion des actifs ? Par où commencer? Les responsables municipaux s’interrogent souvent sur la marche à suivre pour mettre en place une politique de gestion des actifs. C’est pour les aider à entreprendre une démarche en ce sens que le Centre d’expertise et de recherche en infrastructures urbaines (CERIU) a élaboré un projet de capsules vidéo (1) dans lesquelles sept élus et gestionnaires de municipalités québécoises font part de leurs expériences et de leurs conseils. Chacune des capsules aborde un thème différent, que ce soit la préparation d’un premier portrait des actifs, les informations clés à détenir, la mobilisation de l’ensemble des élus et des gestionnaires, etc.

« Trop souvent, les municipalités sont en mode réaction lorsque survient un bris plutôt que proactives, constate Marie-Élaine Desbiens. Elles ont beaucoup de données relatives à leurs actifs, mais l’information n’est pas toujours traitée et rendue accessible à l’ensemble des responsables des différents services municipaux. »

« Les responsables municipaux manquent souvent de lieux d’échange pour parler de leurs défis communs. Grâce aux capsules vidéo, qui ont à la fois un côté pédagogique et ludique, ils voient de façon concrète comment des municipalités s’y sont prises pour mieux gérer leurs actifs, ce qui peut les inspirer à aller de l’avant », explique Marie-Élaine Desbiens, ingénieure et consultante sur la gestion d’actifs, qui a collaboré à la conception du projet du CERIU. Celui-ci a été financé par la Fédération canadienne des municipalités (FCM).



Passer à l’action

Plessisville est une des municipalités qui a accepté de témoigner de son expérience, elle qui est à pied d’œuvre pour élaborer une politique de gestion des actifs depuis 2016.

Centre-ville de Plessisville (rue St-Calixte). Plessisville est une des municipalités qui a accepté de témoigner de son expérience, elle qui est à pied d’œuvre pour élaborer une politique de gestion des actifs depuis 2016. CR: DomLemLali 2019 (Creative Commons)

 

« Comme première étape, on s’est attardé à intégrer les principes de la gestion des actifs dans nos pratiques de gouvernance, explique Marie-Pierre Paquette, chargée de projet à la direction générale de la municipalité du Centre-du-Québec. Qui fait quoi ? Dans quel état sont nos infrastructures ? Quels sont les frais d’exploitation ? Il y a de nombreuses questions auxquelles il faut répondre pour ne pas se perdre dans cet immense enjeu de la gestion des actifs. On voulait ainsi partir avec une bonne fondation sur laquelle appuyer les décisions dans l’avenir. »

Marie-Pierre Paquette, chargée de projet à la direction générale de la municipalité de Plessiville

Même s’il ne s’agit pas d’une obligation légale, les municipalités ont beaucoup à gagner à élaborer une telle politique : obtenir un portrait à jour de l’état des actifs, prioriser les investissements dans ceux qui sont à plus haut risque de défaillance, prévenir des déficits d’entretien, éviter des coûts élevés de réparation en cas de bris, assurer le maintien et la qualité des services. Il est aussi important de mettre en place une politique de gestion qui va perdurer pour éviter que tout soit à refaire au fil des changements de garde à la suite des élections municipales.

 Gérer le changement

« Trop souvent, les municipalités sont en mode réaction lorsque survient un bris plutôt que proactives, constate Marie-Élaine Desbiens. Elles ont beaucoup de données relatives à leurs actifs, mais l’information n’est pas toujours traitée et rendue accessible à l’ensemble des responsables des différents services municipaux. »

Outil sur la planification à long terme des routes (extrait d’un fichier Excel). L’objectif de cet outil est d’aider à documenter un inventaire et, selon le site du CERIU, à évaluer « les besoins en investissements pour maintenir le parc d’actifs en état de fournir les services sur le long terme (20 ans). Ce fichier, ajoute-t-on, ne donne pas une solution ni n’indique ce qui doit être fait : c’est un outil qui aidera à développer des scénarios d’investissements. » CR: CERIU

 

C’est pour remédier à cette situation que Plessisville s’est dotée d’un logiciel de gestion de maintenance assistée par ordinateur (GMAO) qui répertorie les actifs de la municipalité et prévoit des routines de maintenance. « L’inventaire de nos actifs est complété à 90 %, estime Marie-Pierre Paquette. On a pu embaucher une personne-ressource qui s’est consacrée à cette tâche à temps plein. Elle était également chargée de la formation aux gestionnaires qui devaient apprendre à utiliser l’outil. Il ne faut surtout pas négliger la gestion du changement. Agir davantage en prévention exige de changer ses vieux réflexes. »

Simon Prévost, directeur des travaux publics et de l’ingénierie à Saint-Adolphe-d’Howard

« S’engager dans cette démarche, c’est un processus qui peut être lourd. Il ne faut pas hésiter à se faire accompagner par des experts, conseille Simon Prévost, directeur des travaux publics et de l’ingénierie à Saint-Adolphe-d’Howard, dans les Laurentides, qui a participé au projet du CERIU. Embaucher une firme d’ingénieurs pour dresser un état des infrastructures routières, par exemple, permet en plus de faciliter l’obtention de subventions pour des travaux d’entretien ou de réparation puisque la demande s’appuie sur des informations justes et vérifiées. Ce sera de l’argent bien investi. » ■

(1) https://ceriu.qc.ca/bibliotheque/petites-municipalites-gestion-actifs-entretien-elus-gestionnaires-du-monde-municipal