La réfection de la digue de la centrale des cèdres
Assurer la pérennité d’une centrale historique
La centrale des Cèdres, située en Montérégie, a été construite en 1913 et 1914, juste avant la Grande Guerre. Une digue avait alors été érigée à partir de remblais en amont de la centrale pour que l’eau du fleuve puisse s’y rendre à travers un canal d’amenée.
Par Jean Brindamour
Cette centrale, la deuxième plus ancienne exploitée par Hydro-Québec, après celle de Shawinigan-2, a joué un rôle important dans le développement de l’hydroélectricité au Québec.
Une centrale pleine d’histoire
Deux des plus importantes compagnies d’électricité québécoises du début du XXe siècle, la Shawinigan Water and Power Company et la Montreal Light, Heat and Power Company ont collaboré pour construire sur le fleuve Saint-Laurent, entre les lacs Saint-François et Saint-Louis, la centrale des Cèdres. L’idée était dans l’air, mais c’est une entente avec Aluminium Company of America (aujourd’hui connu sous le nom de son acronyme Alcoa) qui permet de la concrétiser. Cet accord comprenait un contrat d’approvisionnement pour son usine de Massena, une petite ville de l’État de New York. La centrale des Cèdres devint ainsi la première installation hydroélectrique de la province dont la production était massivement destinée à être exportée à l’extérieur du Québec.
Dès sa mise en marche, grâce à ses neuf groupes turbines-alternateurs, sa puissance totale de 75,8 MW dépassait celle de la centrale de Shawinigan-2. En 1924, l’ajout de neuf autres groupes porte sa puissance à 162 MW, ce qui en fait à cette époque la plus importante centrale hydroélectrique du Québec. C’est le 15 avril 1944, au moment de la nationalisation de la Montreal Light, Heat and Power par le gouvernement libéral d’Adélard Godbout, qu’elle a été acquise par Hydro-Québec.
Coûts envisagés : 40 millions $. Échéancier des travaux : automne 2018 au printemps 2020. Déversement minimum estimé dans le cadre de l’excavation : 100 000 m3 d’un mélange de till, de matériau granulaire et de blocs de roche.
Mentionnons qu’Hydro-Québec a pu achever, récemment, son projet de réhabilitation des groupes turbines-alternateurs de la centrale des Cèdres. « C’est en février 2017, que nous avons terminé la réfection d’un troisième groupe turbine-alternateur », signale Mathieu Rouy, porte-parole d’Hydro-Québec.
On peut s’interroger sur le fait qu’on n’ait décidé que si tardivement la réfection de la digue. Les différentes études et inspections réalisées par Hydro-Québec avaient en effet permis de constater de l’infiltration et des écoulements en provenance du canal d’amenée dès 1980. La réponse appartient au niveau d’alarme: « La digue est sécuritaire et ne présente pas de risque, rétorque Mathieu Rouy, et Hydro-Québec surveille en continu l’état de la digue, grâce à des inspections régulières. Hydro-Québec devait néanmoins réaliser ces travaux afin d’assurer simplement sa pérennité. »
On explique ces infiltrations par la construction de la centrale de Beauharnois en 1932, qui a modifié la pression d’eau du fleuve et ainsi stimulée la pression d’eau. Ajoutons que la présence d’arbres, longtemps tolérée, facilite aussi l’infiltration d’eau et les érosions.
Environnement et acceptabilité sociale
Pour la réfection de la digue, les consultations publiques ont déjà eu lieu les 23 et 24 novembre 2016. « Les intervenants du milieu et la population ont accueilli favorablement le projet, raconte Mathieu Rouy. Les participants aux différentes activités de participation du public ont apprécié la formule et se sont dits satisfaits des réponses fournies par Hydro-Québec. Hydro-Québec a tenu compte des préoccupations des représentants du milieu et des citoyens qui portaient notamment sur la végétation. À titre d’exemple, l’entreprise a pris l’engagement de planter un arbre pour chaque arbre qu’elle coupera sur la digue. »
Ce projet étant soumis à l’article 31.1 de la Loi sur la qualité de l’environnement, Hydro-Québec devra déposer une étude d’impact sur l’environnement au ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. « Hydro-Québec prévoit le faire au cours du printemps 2017 », précise M. Rouy.
Quant au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), il y aura une séance d’information. « Une audience publique pourrait être tenue si des citoyens en font la demande par écrit après la séance d’information, souligne Mathieu Rouy. Le projet pourrait donc faire l’objet d’un examen public du BAPE. Le processus commencera en 2017. »
Description des travaux
Pour des coûts envisagés de 40 millions $ et un échéancier des travaux allant de l’automne 2018 au printemps 2020, il faudra excaver une partie du talus de la digue, déverser plus de 100 000 m3 d’un mélange comprenant du till, du matériau granulaire et des blocs de roche.
Un filtre inverse, constitué de plusieurs couches de remblai granulaire, sera ajouté sur une distance de près de 1 190 m dans le bassin de Saint-Timothée, et de près de 120 m dans le bassin de la Pointe-du-Buisson. Pour la stabilisation de talus sur une distance de près 175 m dans le bassin de Saint-Timothée et de près de 125 m dans le bassin de la Pointe-du-Buisson, Hydro-Québec déversera environ 10 000 m3 de matériau granulaire et de roches sur le côté de la digue. « Nous procéderons à la réfection du remblai de la digue du canal. Aucune intervention n’est prévue dans la centrale comme telle dans le cadre de ce projet », indique M. Rouy.
Pendant la durée des travaux, l’eau du canal d’amenée de la centrale des Cèdres sera maintenue à son niveau habituel. Un rideau de confinement installé dans le canal d’amenée de la centrale servira à retenir les particules qui seront mises en suspension lors de la mise en place des nouveaux matériaux.
Le choix de ceux qui réaliseront ces travaux n’est pas encore arrêté. « Lorsqu’elle aura reçu les autorisations gouvernementales nécessaires à la réalisation de son projet, Hydro-Québec lancera un appel d’offres pour octroyer le contrat », conclut le représentant d’Hydro-Québec. Nous connaîtrons à ce moment-là l’entrepreneur en charge. » Cette opération devrait prolonger la durée de la centrale, en route vers son deuxième centenaire, d’au moins 65 ans. •