Recrutement international
Des ressources pour les entrepreneurs
Rareté de la main-d’œuvre
Il est suggéré de bien cibler ses besoins à long terme, non seulement quant au nombre de travailleurs recherchés, mais aussi quant à leur rôle. Une réflexion d’autant plus cruciale que le domaine de la construction est très réglementé.
Plus de 17 000 postes seraient à pourvoir dans le domaine de la construction, selon les données du Conseil du patronat du Québec. Pour contrer la pénurie de main-d’œuvre, recruter à l’international peut s’avérer une solution intéressante. Conseils pour mener à bien ce chantier.
Par Anne-Marie Tremblay
« Quand on recrute à l’international, il faut voir cela comme une stratégie à court, à moyen et à long terme », lance d’emblée Sonia Lopez Moran, partenaire principale chez Strategiko, Mobilité internationale. En effet, les différentes étapes entre le début des démarches et le moment où les travailleurs recherchés arrivent en sol québécois peuvent s’échelonner sur plusieurs mois, explique-t-elle.
C’est pourquoi elle suggère de bien cibler ses besoins à long terme, non seulement quant au nombre de travailleurs recherchés, mais aussi quant à leur rôle. Une réflexion d’autant plus cruciale que le domaine de la construction est très réglementé. « Si la Commission de la construction du Québec a assoupli certaines règles pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre, les travailleurs étrangers temporaires doivent travailler hors décret, explique-t-elle, à moins qu’ils aient obtenu certaines équivalences.» Cela ne veut pas dire que c’est mission impossible pour autant : « L’un de mes clients en génie civil recrute régulièrement à l’étranger. Ces travailleurs viennent en aide aux ouvriers sur les chantiers, en effectuant des tâches hors décret », donne-t-elle comme exemple.
« Si la Commission de la construction du Québec a assoupli certaines règles pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre, les travailleurs étrangers temporaires doivent travailler hors décret, explique Sonia Lopez Moran, à moins qu’ils aient obtenu certaines équivalences. »
Recruter sur l’échiquier mondial
À moins d’avoir des antennes ailleurs sur la planète, il peut être difficile de dénicher des talents à l’étranger. C’est pourtant la toute première étape d’un projet de recrutement à l’international. « Oui, certaines personnes vont trouver un candidat par bouche-à-oreille, note Sonia Lopez Moran. Mais, encore plus avec la pénurie, les entrepreneurs ont rarement le temps de s’y lancer. Quand on a un réseau limité de contacts hors Québec, il est possible de se tourner vers une agence de recrutement », ajoute-t-elle. Les entreprises de la construction peuvent aussi contacter des associations spécialisées, comme Les Compagnons du Devoir, en France, propose Mme Moran. Ce regroupement réunit de jeunes apprentis dans différents domaines, incluant la construction. Des organisations comme Québec International, Montréal International et la Société de développement économique de Drummondville s’envolent également régulièrement en mission de recrutement à l’étranger, en collaboration avec le gouvernement du Québec.
Ainsi, les prochaines Journées du Québec s’arrêteront au Maroc en février 2023. Des employeurs provenant de différents secteurs ciblés, comme la construction, pourront donc rencontrer des candidats présélectionnés sur place. Montréal International et d’autres organismes permettent par ailleurs de diffuser des offres d’emploi dans un réseau de milliers de travailleurs étrangers qualifiés, notamment en génie ou dans les domaines techniques.
Différents types d’accompagnement
Une fois ces talents ciblés, il faut ensuite obtenir différentes approbations gouvernementales, en particulier en obtenant une EIMTR (étude d’impact sur le marché du travail) d’Emploi et Développement social Canada (EDSC), ainsi qu’une demande de sélection temporaire au provincial. Une démarche qui coûte plus de 1000 $ par candidat. « Il est possible que l’entreprise s’en occupe elle-même, si elle a un expert en ressources humaines, par exemple, mais consulter un expert comme un avocat en immigration ou un conseiller en immigration réglementé permet de s’assurer de bien remplir sa demande et d’éviter les erreurs », souligne Sonia Lopez Moran. Ce faisant, on améliore ses chances de recevoir une réponse positive. Une fois ces obligations remplies, il faut ensuite lancer les autres démarches pour l’entrée au Canada, comme l’obtention d’un visa.
Pour passer à travers ce processus, il est donc possible de se faire accompagner. Certains organismes, comme Québec International, offrent du soutien ou de la formation, alors que les agences de recrutement peuvent proposer des services clés en main. Or, il faut se montrer sélectif, avertit Sonia Lopez Moran, car certaines d’entre elles ne sont pas éthiques et exigent des frais pour que les candidats puissent participer au processus de sélection. D’où l’importance de les questionner sur leurs façons de faire, quitte à demander des références.
De la même manière, certaines firmes s’occupent elles-mêmes des entrevues. Toutefois, établir rapidement le contact est primordial pour éviter les désistements, souligne Paulin Grenier, partenaire principal, chez Strategiko, Mobilité internationale. « Il est important d’apprendre à connaître le candidat sélectionné et de l’engager avant son arrivée au Québec, de créer un lien et un sentiment d’appartenance à l’entreprise en montrant à l’avance la nature du travail, le milieu où ils seront, l’hébergement, présenter les collègues. Tout cela peut se faire de façon virtuelle. »
Une fois ces talents ciblés, il faut ensuite obtenir différentes approbations gouvernementales, en particulier en obtenant une EIMTR (étude d’impact sur le marché du travail) d’Emploi et Développement social Canada (EDSC), ainsi qu’une demande de sélection temporaire au provincial. Une démarche qui coûte plus de 1000 $ par candidat.
Pour réussir cette opération, Paulin Grenier suggère aussi de préparer le terrain, en informant les membres de son équipe de l’arrivée de ces recrues, en leur offrant une formation sur les différences culturelles ou en mettant en place un système de jumelage. « On peut aussi profiter du laps de temps pour offrir des cours de francisation à distance ou même commencer la formation de la main-d’œuvre. » Plusieurs organismes communautaires offrent aussi du soutien pour l’intégration de ces nouveaux arrivants.
Bref, il ne faut pas oublier que les travailleurs étrangers sont des humains, rappelle Sonia Lopez Moran. « Parfois, certaines personnes me disent qu’elles veulent “commander” des employés. Mais ce ne sont pas des produits ! » Se préoccuper du bien-être de ces travailleurs reste essentiel pour établir une relation à long terme. ■