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La construction accélérée au service des villes

Une méthode innovante aux nombreux atouts

De plus en plus utilisée pour réaliser des ouvrages publics, la méthode de la construction accélérée présente de nombreux avantages techniques, financiers et pratiques pour les villes, les usagers et les professionnels qui travaillent sur ces chantiers. Présentation de ce mode de construction dans l’air du temps.

Par Elsa Bourdot

Axe important du réseau routier de Montréal, le passage inférieur Christophe-Colomb/Des Carrières, situé dans le quartier Rosemont, va bénéficier de travaux de rénovation au printemps 2023.

Le passage inférieur Christophe-Colomb/Des Carrières vu du ciel. Photo satellite (Google Earth).

 

Afin de réduire les nuisances provoquées par cette réfection, la Ville a souhaité intégrer à ce chantier des matériaux et des modes de construction innovants comme la construction accélérée, aussi connue sous le nom de méthode ABC (Accelerated Bridge Construction).

« Des usines sur mesure mises en place pour la construction de gros projets comme le pont Champlain ou le REM peuvent être réutilisées dans d’autres projets qui nécessitent la fabrication d’éléments semblables », explique Bruno Massicotte. 

Déjà utilisé depuis de nombreuses années en Europe, en Asie, aux États-Unis et en Ontario, ce mode de construction se développe au Québec et permet de réduire les délais de réalisation grâce à la préfabrication en usine de plusieurs éléments de l’ouvrage.



Afin de l’aider à concevoir et à intégrer la méthode de construction accélérée à ce projet, la Ville de Montréal a fait appel à l’expertise de Polytechnique Montréal. Bruno Massicotte, ingénieur et professeur titulaire au département des génies civil, géologique et des mines au sein de l’établissement apportera son aide pour réaliser les plans et les devis du projet.

La construction accélérée permet de réduire les délais de réalisation grâce à la préfabrication en usine de plusieurs éléments de l’ouvrage.

Spécialiste des techniques et des matériaux innovants, M. Massicotte a déjà participé à plusieurs projets pour la Ville et le ministère des Transports du Québec.

construction accélérée. Afin de l’aider à concevoir et à intégrer la méthode de construction accélérée à ce projet, la Ville de Montréal a fait appel à l’expertise de Polytechnique Montréal. Sur notre photo, des colonnes de ponts préfabriquées au Laboratoire de Structures de Polytechnique Montréal. CR et © Bruno Massicotte – 2021

La construction accélérée, une méthode qui se démocratise

La construction accélérée consiste en la préfabrication et à l’industrialisation de nombreux éléments d’un ouvrage en usine. Ces éléments sont ensuite assemblés sur le chantier. « Quand on parle de construction accélérée, il s’agit le plus souvent d’ouvrages en béton. C’est une technique de construction qui n’est pas nouvelle, mais qui connaît un nouveau souffle. » précise M. Massicotte.



Aujourd’hui, la construction accélérée intègre environ 30 à 40 % d’éléments préfabriqués hors site, mais cela peut atteindre 80 %. Cette alternative aux systèmes de construction traditionnels se développe et transforme de plus en plus le monde de la construction. « La construction accélérée était utilisée à l’époque pour des projets d’envergure. Maintenant, on voit plutôt une démocratisation pour des petits ouvrages ou des ouvrages courants. On est passé en mode standardisation. »

Respecter plus facilement les délais et réduire les coûts

La construction accélérée permet en moyenne de diviser par deux la durée des chantiers grâce à une optimisation en amont permettant un assemblage rapide sur chantier. « On va gagner du temps en évitant de couler le béton sur place, une étape très longue. Un projet de 3 mois à fabriquer en mode construction traditionnelle peut être fait en moins d’un mois pour un pont courant », explique M. Massicotte.

La construction accélérée permet d’éviter les retards de livraison et optimise la fabrication, réduisant ainsi les coûts. « Des usines sur mesure mises en place pour la construction de gros projets comme le pont Champlain ou le REM peuvent être réutilisées dans d’autres projets qui nécessitent la fabrication d’éléments semblables. »

Une qualité améliorée pour une construction plus durable

La construction accélérée permet d’améliorer la qualité des ouvrages. En effet, il est plus facile de contrôler en usine la qualité, élément par élément. M. Massicotte le confirme: « Le béton fabriqué en usine a déjà prouvé ses qualités et on est sûr de sa résistance quand on l’installe. Le contrôle qualité est plus facile à appliquer et en cas d’erreur, il est plus facile de le corriger. »

« On va gagner du temps en évitant de couler le béton sur place, une étape très longue. Un projet de 3 mois à fabriquer en mode construction traditionnelle peut être fait en moins d’un mois pour un pont courant », explique Bruno Massicotte. 

Cette qualité améliorée permet de construire des ouvrages plus durables et plus résistants, mais aussi moins impactants au niveau environnemental. En construisant les éléments en amont en usine, il est plus facile d’éviter le gaspillage de matières premières et de recycler les déchets.

Des conditions de travail améliorées

La construction accélérée est un atout majeur en matière d’efficacité et de coûts liés aux conditions de travail. « Cela demande beaucoup moins d’opérations à faire en chantier. Soit on réduit la main-d’œuvre, soit on va beaucoup plus vite », souligne M. Massicotte. « La préfabrication en usine permet de travailler hors saison, un avantage indéniable au Québec. De plus, la main-d’œuvre qui travaille à l’intérieur bénéficie de conditions plus faciles que la main-d’œuvre qui travaille en chantier, exposée aux intempéries. »



La construction accélérée a de beaux jours devant elle. « La rareté de main-d’œuvre et les besoins de construction croissants dus à la densification de population vont accentuer le recours à la préfabrication. » Un avantage pour les donneurs d’ouvrage comme pour les usagers. « Si on a de meilleures infrastructures qui coûtent moins cher, tout le monde en bénéficie » conclut M. Massicotte. ■