La Ville s’est dotée d’une Stratégie montréalaise de l’eau dont le Plan de financement 2011-2020 prévoit des investissements de 4,6G$ sur 10 ans.
Plus grande ville de la Belle Province, la municipalité de Montréal doit assurer l’alimentation et l’assainissement des eaux servies aux 2 millions d’habitants qu’abritent les 14 villes et les 19 arrondissements de l’île de Montréal, soit le quart de la population québécoise. La quotidienneté de ce service essentiel exige des installations gigantesques, des aménagements de secours et des procédures de traitement exemplaires pour qu’aucun grain de sable ne vienne enrayer la pompe.
Par Michel Joanny-Furtin
En 2002, diverses études révélaient les carences de la Ville de Montréal dans sa gestion de l’eau. La création en 2005 de la Direction de l’eau, qui deviendra le Service de l’eau en 2010, permettra de structurer les activités liées à cette ressource. Le Service de l’eau dispose aujourd’hui de 6 usines de production d’eau potable réparties par secteur sur son territoire (voir carte) et d’une station d’épuration, la troisième plus importante au monde !
Les usines Atwater et Des-Baillets puisent l’eau dans le fleuve Saint-Laurent à 500 m de la rive, en amont des rapides de Lachine, où le courant fort réduit les matières en suspension et facilite le traitement de l’eau. Dorval, Pointe-Claire et Lachine s’approvisionnent dans le lac Saint-Louis; et Pierrefonds dans la rivière des Prairies. Ensemble, elles distribuent près de 600 647 438 m3/an d’eau potable (chiffres 2015).
Avec une capacité de traitement de 1 363 640 M3/jour, l’usine Atwater traite la plus grande quantité d’eau potable au Québec. Elle se place en seconde position à l’échelle du Canada, et assure l’alimentation de près de la moitié de l’île de Montréal.
Les eaux captées
Ce traitement commence par le dégrillage où une grille tamise l’eau de ses débris (branchages, poissons, détritus, etc.). Suit alors la clarification, ou coagulation-floculation-décantation lorsqu’un sel d’alun (ou chlorure) injecté agglomère en flocons les particules en suspension. Elles décantent au fond d’un bassin avant de passer dans le réseau d’égouts (Lachine, Dorval, Pointe-Claire, Pierrefonds). Puis un lit filtrant de sable de silice d’un mètre d’épaisseur (filtration) élimine environ 85% des bactéries et retient les matières en suspension.
Lors de l’ozonation, un désinfectant efficace et sûr, l’ozone, oxyde la matière organique et élimine les virus et bactéries résistant à la filtration (Des-Baillets, Lachine, Pierrefonds). Précédée d’un rayonnement UV, la chloration empêche la prolifération des bactéries avant la distribution de l’eau dans le réseau. Une étape essentielle lorsqu’il n’y a pas d’ozonation. Plusieurs postes de chloration sur le réseau ajustent les dosages.
Les eaux usées
Selon les intempéries, la station d’épuration Jean-R.-Marcotte, dans l’est de Montréal, traite quotidiennement entre 2,5 et 7,6 millions m3 d’eaux usées, soit le volume intérieur du stade olympique de Montréal, ou la moitié des eaux usées traitées au Québec. Construite dès 1976, opérationnelle en 1984, ce n’est qu’en 1996, plus de 20 ans après, que la totalité des eaux usées de l’île de Montréal était acheminée à la station d’épuration.
Le processus d’assainissement suit des étapes assez parallèles à l’eau brute puisée dans le fleuve : un dégrillage pour ôter les détritus; un dessablage pour ôter les abrasifs, notamment en hiver; la coagulation-floculation-décantation des particules en suspension grâce à l’ajout de produits chimiques. Les boues qui en résultent sont déshydratées et les «gâteaux» obtenus sont incinérés. La station d’épuration en récupère l’énergie pour le chauffage. Épurée, l’eau reprend alors le chemin du fleuve Saint-Laurent.
Le coût de l’eau
« Montréal produit annuellement environ 763 litres d’eau par personne, soit presque le double d’autres villes au Canada : Toronto (594 litres), Ottawa (415 litres), Calgary (568 litres), Edmonton (543 litres) et Vancouver (563 litres) », affirme le site internet de la Ville. Pourtant, le coût de l’eau ne revient qu’à « 100$/an par Montréalais, soit la moitié d’autres villes en Amérique du Nord (200$ à Toronto et Philadelphie, 226$ à
Atlanta). »
Plus du tiers des conduites d’eau potable ont dépassé 70% de leur durée de vie utile et un autre tiers l’atteindra dans les prochaines années. La Ville s’est donc dotée d’une Stratégie montréalaise de l’eau dont le Plan de financement 2011-2020 prévoit, sur 10 ans, des investissements de 4,6G$ et un budget de fonctionnement de 3,9 G$.
L’installation de compteurs dans les ICI (industries, commerces et institutions) entraînerait une baisse importante de leur consommation. Une réduction de 10% de la production d’eau permettrait d’abaisser les coûts d’environ 5M$/an. •
LES CHIFFRES DE L’EAU MONTRÉALAISE
L’aqueduc, c’est…
770 km de réseau principal, avec 3 200 vannes
3 600 km de réseau secondaire, avec 31 000 vannes
22 000 bornes d’incendies
400 à 2 700 mm de diamètre pour les conduites principales
100 à 350 mm de diamètre pour les
conduites secondaires
L’égout, c’est…
644 km de réseau principal
4 300 km de réseau secondaire
148 000 puisards
140 postes de pompage
Le Service de l’eau de Montréal, c’est…
900 employés
9 196 km de conduites globales (aqueduc et égout), soit la distance de Montréal à Buenos Aires
99,4% des eaux usées traitées quotidiennement par temps sec
Près de 50% de toutes les eaux usées industrielles du Québec sur une base annuelle