Dossier Innovation et SST
Comme dans tous les secteurs d’activité actuels, les technologies de l’information et les bases de données ajoutent de nombreux outils au coffre des grandes entreprises de construction. Chez EBC, la conception de logiciels innovants a permis d’améliorer grandement la prévention en santé et sécurité.
Par Mario Cloutier
EBC fait partie des entreprises qui œuvrent sur de grands projets comme le REM, à Montréal, et Site C (hydroélectricité) en Colombie-Britannique. Une équipe en santé et sécurité au travail (SST) de la firme de Québec est présente sur tous les chantiers où elle est en activité.
Le directeur en SST chez EBC, Nicolas Laliberté, le souligne: « Notre présidente, Marie-Claude Houle, fait de la SST sa valeur principale. Il faut former nos employés en ce sens pour que tout le monde soit sur la même longueur d’onde. On gère le même programme avec la même rigueur, peu importe l’ampleur du projet. »
Avec près de 2 000 employés, EBC a compris que le travail en amont était primordial en SST. Avant même de démarrer un projet, tout un processus est déjà en place pour respecter les standards que la société s’est donnés avec le temps.
« Ça ne commence pas par un coup de marteau sur un clou, note Nicolas Laliberté. Ça commence dès que les gens planifient l’engagement de nos ressources, l’achat des matériaux et la planification des travaux. Lorsqu’on arrive sur le chantier, on a déjà un plan pour éviter une longue courbe d’apprentissage. »
Outils de gestion
Sur le terrain, les ouvriers bénéficient déjà d’équipements de plus en plus sophistiqués assurant leur sécurité : mécanismes de freinage automatique sur certains outils, détecteurs à infrarouge, drones, réalité virtuelle, entre autres. Mais le constructeur aussi s’est démarqué par la mise en place, depuis une dizaine d’années, d’outils de gestion en santé et sécurité capables de traiter des milliers de données en temps réel.
« Innover, ce n’est pas seulement acheter une nouvelle machine ou un nouveau gadget, c’est aussi se doter de moyens de prévention dans la gestion de notre système, qui peut mesurer et même prédire où surviendra le prochain accident. Des applications sont à notre disposition pour nous aider à compiler et à analyser en temps réel une foule de données avec lesquelles, avant, on ne savait pas trop quoi faire. On a des tableaux de bord qui nous indiquent les écarts survenus par rapport aux programmes de prévention. Ça alimente rapidement notre discussion avec les travailleurs et identifie nos besoins de formation en chantier. C’est une toute nouvelle dynamique. »
Les contremaîtres peuvent ainsi parler de problèmes plus spécifiques avec leurs équipes, ce qui dépasse largement les conseils de base concernant l’usage de bouchons auriculaires, d’un casque ou de gants.
« Il faut se servir des données en les extrayant et en les partageant. On y a intégré plusieurs réunions, rapports automatiques, quotidiens et hebdomadaires. C’est instantané maintenant. Les chantiers n’ont qu’un clic à faire, le rapport se produit tout seul, et le client qui le reçoit est heureux. » — Nicolas Laliberté
« Si on remarque qu’un travailleur a de la difficulté à ajuster un harnais et qu’un autre, sur un chantier différent, a le même problème, ça veut dire que c’est une tendance sur laquelle on peut travailler. Il ne s’agit pas de cibler des individus, mais de former des équipes au complet avec la gestion de ces outils. »
Modernisation
Le gouvernement québécois vient d’adopter la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, dans laquelle on trouve de nouveaux mécanismes de prévention axés sur la participation des travailleurs.
« Tout ça ensemble fait en sorte que ça avance. Au-delà de la visite de chantier d’un inspecteur qui s’assure que tous ont leurs bottes de travail et que les échafaudages sont bien ancrés, on demande aux entrepreneurs d’avoir leur propre système de gestion en santé et sécurité. Une fois qu’on en a un, il faut pouvoir mesurer sa performance. C’est là que les logiciels sont fort utiles. »
À partir d’une soumission, ces systèmes permettent d’intégrer à une application de production, les budgets, la planification, les horaires, la paie, tout ce qui permet d’élaborer des indicateurs de performance. On peut aussi y insérer les accidents de travail qui, avec les heures travaillées, permettent d’établir des statistiques.
« Les grands donneurs d’ouvrage nous demandent si nous avons des systèmes pour nous assurer de la conformité des chantiers en lien avec les lois et les règlements. Les grands acteurs le font, et les petits acteurs aussi vont devoir embarquer. »
Améliorer constamment les pratiques
Certains logiciels proviennent du secteur industriel et sont adaptés par la suite pour la réalité de chaque constructeur. L’objectif est de pouvoir concentrer les efforts sur les risques et d’améliorer constamment les pratiques.
« Il faut se servir des données en les extrayant et en les partageant. On y a intégré plusieurs réunions, rapports automatiques, quotidiens et hebdomadaires. C’est instantané maintenant. Les chantiers n’ont qu’un clic à faire, le rapport se produit tout seul, et le client qui le reçoit est heureux. »
Désormais, une enquête à propos d’un accident va plus loin que la recherche des causes. Avec ces nouvelles méthodes de gestion, l’entreprise peut aviser le contremaître rapidement pour modifier les pratiques et éviter les accidents.
Selon Nicolas Laliberté, l’avenir nous prodiguera son lot de découvertes en ce domaine : « Il n’y a pas de limites à ce qu’on peut faire pour améliorer les choses en santé-sécurité. On peut même avoir des capteurs sur les travailleurs qui nous indiquent la géolocalisation, le rythme cardiaque et le taux d’oxygène dans un espace clos en temps réel. C’est très encourageant pour l’avenir. » ■