MAGAZINE CONSTAS

Santé et sécurité au travail : les systèmes de gestion

Une approche globale pour une démarche spéciale

« En gros, tous ces systèmes se valent, observe Michel Pérusse. Or ça reste des outils de gestion, on s’en sert ou pas. Si on s’en sert, il faut bien le faire. Si on ne s’en sert pas, alors tant pis. Le système ne peut rien à lui seul. »

Les systèmes de gestion de la santé et de la sécurité du travail (SST) fournissent un cadre de référence pour structurer la prévention et positionnent la SST comme un pilier stratégique d’une bonne santé organisationnelle. Mais ils ne peuvent garantir à eux seuls un haut niveau de résultats. Constas fait le point avec le professeur Michel Pérusse.

Par Marie Gagnon

Michel Pérusse, professeur associé à l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke.

Tous les secteurs industriels comportent des risques pour les travailleurs qui y évoluent. Certains secteurs, comme les mines, les forêts ou la construction, sont encore plus à risque. L’identification des dangers potentiels et la mise en œuvre de moyens appropriés pour les prévenir et les maîtriser constituent donc un souci constant pour les organisations, quel que soit leur domaine d’activité. Cette préoccupation ne date d’ailleurs pas d’hier. Elle se manifeste dès la fin du 19e siècle, mais il faudra attendre encore près de 75 ans avant que la SST ne fasse l’objet d’efforts organisés et structurés.

Au Québec, entre autres, les premières enquêtes d’accident, les premières analyses de tâches et d’environnements de travail ne sont réalisées qu’au cours de la décennie 1970. C’est également à cette époque qu’apparaissent les premiers programmes de prévention, notamment pour les travaux en hauteur et en espace clos. Mais la SST n’est toujours pas systématisée et aucun guide n’en recense les meilleures pratiques. Jusqu’à ce que le British Standard Institution (BSI) lance, en 1996, le premier système de gestion de la prévention, la norme BS 8800 Guide to occupational health and safety management systems.

Systématiser la prévention

«C’est la première fois que la prévention est organisée en un système rigoureux et structuré, signale Michel Pérusse, professeur associé à l’École de gestion de l’Université de Sherbrooke. En 1999, le BSI va encore plus loin dans l’harmonisation des pratiques en publiant la norme OHSAS 18001. » Fruit d’une collaboration internationale, ce référentiel basé sur la roue de Deming – planifier, faire, vérifier, agir – est conçu pour être utilisé à des fins de certification.

L’identification des dangers potentiels et la mise en œuvre de moyens appropriés pour les prévenir et les maîtriser constituent un souci constant pour les organisations, quel que soit leur domaine d’activité.

C’est pourquoi les systèmes de gestion élaborés selon ce modèle partagent certains éléments fondamentaux. Comme une politique SST qui établit clairement les orientations de l’entreprise et un système de gestion des risques s’appuyant sur la planification (inventaire et maîtrise du risque), la mise en œuvre (responsabilités et ressources) et la vérification (surveillance, évaluation et actions correctives). Le système se complète d’une revue de direction annuelle faisant le point sur l’atteinte des objectifs.

Mais l’OHSAS 18001, comme le BS 8800, n’impliquait pas les premiers intéressés, à savoir les travailleurs. Cette lacune sera comblée en 2001 par le Bureau international du travail (BIT), qui élabore les principes directeurs d’ILO-OSH, une norme non certifiable contrairement aux normes de portée nationale CSA Z1000 ou ANSI Z10 qui, pourtant, en découlent.

ISO entre en scène

En septembre 2018, c’est au tour de l’Organisation internationale de normalisation (ISO) d’y aller de son propre système de gestion de la SST, ISO 45001. Certifiable mais volontaire, cette norme s’harmonise avec les systèmes ISO 9001 (Qualité) et ISO 14001 (Environnement), dont elle partage la structure, la terminologie et les définitions. OHSAS 18001 étant par ailleurs plus ou moins calquée sur ISO 14001, la transition vers ISO 45001 sera d’autant facilitée.

« En gros, tous ces systèmes se valent, observe Michel Pérusse. Ils ont à peu près tous les mêmes ingrédients, tantôt un peu de ceci, tantôt un peu de cela. Certains impliquent les travailleurs, d’autres sont certifiables. À l’heure actuelle, OHSAS 18001 a une longueur d’avance sur les autres, mais il y a un engouement qui se crée autour d’ISO 45001. Or ça reste des outils de gestion, on s’en sert ou pas. Si on s’en sert, il faut bien le faire. Si on ne s’en sert pas, alors tant pis. Le système ne peut rien à lui seul. » •