MAGAZINE CONSTAS

L’Expo 67

Terre des hommes, chantier d’une génération

Parmi les grands chantiers qui ont transformé le visage de Montréal, il y a bien sûr les grands projets d’infrastructures routières des années 1960. Mais ces derniers, plus souvent qu’autrement, sont en lien avec un seul et même événement : «Terre des Hommes», l’exposition universelle de 1967 .

Par Marie Gagnon

La décennie 1960 marque un tournant dans l’histoire du Québec, alors que de grands chantiers sont lancés tous azimuts. Construction de ponts, de routes, de viaducs, de barrages et de centrales hydroélectriques, c’est toute la province qui est à pied d’œuvre. Toutefois, comme le rappelle l’historien Jean Provencher dans Ils ont bâti le Québec, ce qui a réellement donné une impulsion nouvelle au réseau autoroutier de Montréal, c’est sans contredit l’annonce, à l’automne 1962, de la tenue d’une exposition universelle en 1967 pour marquer le centenaire de la Confédération.

« Les travaux sont officiellement lancés le 12 août 1963. D’immenses blocs de pierre sont alors extraits de la carrière creusée à même l’île Ronde pour ériger les trois digues de 6 m de haut et de 6 m de large, qui formeront le contour des îles. En dix mois, on excavera quelque 6,8 millions de tonnes de pierre des profondeurs du fleuve. Au final, près de 15 millions de tonnes de terre et de roches seront transportées sur le site. »

Une grande effervescence

C’est ainsi que, de 1963 à 1967, s’engage une véritable course contre la montre alors que la métropole devient un vaste chantier. Pendant que se dessinent le métro, l’autoroute Décarie, l’échangeur Turcot et le pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, le maire de l’époque, Jean Drapeau, donne le coup d’envoi de la construction du site d’Expo 67, au beau milieu du fleuve. Pour ce faire, une île de 600 hectares sera créée de toutes pièces : l’île Notre-Dame, tandis que l’île Sainte-Hélène verra sa superficie doublée.

Un chantier pharaonique, prouesse d’ingénierie et de construction… La construction du site d’Expo 67, en moins de 18 mois, est une prouesse d’ingénierie. Ce chantier pharaonique mène à la création d’une île, à l’agrandissement d’une autre île et à la mutation d’une jetée.

Selon les sources consultées, les travaux sont officiellement lancés le 12 août 1963. D’immenses blocs de pierre sont alors extraits de la carrière creusée à même l’île Ronde (qui sera incorporée à l’île Sainte-Hélène) pour ériger les trois digues de 6 mètres de haut et de 6 mètres de large, qui formeront le contour des îles. L’opération achevée, le site doit être remblayé. À cet effet, on utilise les déblais générés par l’excavation du métro de Montréal. Un flot continuel de camions déferle alors sur le pont Jacques-Cartier, dont les rampes d’accès à l’île Sainte-Hélène sont modifiées pour l’occasion.

Une solution originale

Mais ce n’est pas suffisant. Pour combler les besoins en matériaux de remblai, l’entrepreneur Désourdy suggère une solution pour le moins originale : s’approvisionner à même le fleuve. Une digue est aussitôt construite dans le lit du fleuve et le dynamitage commence. En dix mois, on excavera quelque 6,8 millions de tonnes de pierre des profondeurs du fleuve. Au final, près de 15 millions de tonnes de terre et de roches seront transportées sur le site. Pour la seule île Notre-Dame, les coûts de l’opération se chiffrent alors à
12 millions de dollars (soit près de 90 millions aujourd’hui).

La voie maritime et les îles d’Expo 67. Le génie civil et la voirie à l’honneur !
CR photo: archives de la ville de Montréal

Fin juin 1964, les îles sont prêtes à accueillir les premiers pavillons de l’exposition. Le défi est de taille, car pas moins de 90 pavillons doivent être érigés à temps pour l’ouverture de l’Expo, prévue pour avril 1967. À cela s’ajoutent des kilomètres carrés de pelouse, des dizaines de milliers d’arbres, de plantes, d’arbustes et de fleurs, sans compter les infrastructures nécessaires – routes, égouts, ponts, monorail, etc.

Un transport efficace

Pour transporter le matériel nécessaire à la réalisation de ces ouvrages, on construit le pont de la Concorde, qui reliera l’île Sainte-Hélène à la jetée Mackay, dont la pointe sera prolongée vers le fleuve, et qui deviendra la Cité du Havre et la porte d’entrée principale au site de l’exposition. Livrée en 18 mois seulement, la structure longue de 690 mètres (m) et large de 28 m est l’un des plus longs ponts à dalles orthotropes au monde. La facture s’élèvera à 10,5 millions de dollars.

Reste à concevoir un système efficace pour transporter les visiteurs, dont le plus notable est encore à ce jour l’Expo-Express, mis en place au coût de 18 millions. Ce train léger aux wagons climatisés et à autoguidage par ordinateur – une première au Canada – est un véritable métro de surface miniature, composé de 48 voitures pouvant accueillir jusqu’à 1000 passagers. Son réseau, qui s’étend sur 5,7 km de la Cité du Havre au site de La Ronde, en passant par le pont de la Concorde, est jalonné de cinq stations.

Le 27 avril, après cinq ans de planification et de travaux, l’Expo 67 est officiellement inaugurée. Au cours des six mois qui suivront, plus de 50 millions de visiteurs sillonneront, émerveillés, les îles Sainte-Hélène et Notre-Dame, sans se douter des défis posés par leur aménagement. Des défis liés à la coordination des différents corps de métiers ainsi qu’à la planification des travaux aux chantiers, et relevés par la Compagnie canadienne de l’Exposition universelle (CCEU) grâce à l’implantation de la méthode dite du « chemin critique », un concept développé dans les années 1950 pour assurer la maîtrise des échéanciers.


L’Expo 67 en chiffres

365 hectares
431 M$ (coût global)
3 ponts d’envergure (passerelle du Cosmos, pont des Îles, pont de la Concorde)
27 pontons pour traverser les canaux
82 km de routes
37 km d’égouts
30 km de conduites d’aqueduc
15 km de canalisation sde gaz
115 km de conduites électriques
28 Millions de tonnes de roc