MAGAZINE CONSTAS

Environnement et ressources naturelles : la parole aux Ministères

Pas de changement réglementaire à l’horizon, mais des sablières et gravières à restaurer et revaloriser

Dossier Constas
CARRIÈRES ET SABLIÈRES
DES RESSOURCES ESSENTIELLES

Par Jean Garon

Pas de changement réglementaire à l’horizon

Nous avons posé récemment quelques questions au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) concernant la réglementation sur les carrières et sablières au Québec. Voici les réponses fournies par sa direction des communications.

Q. Où en est-on dans l’application du nouveau Règlement sur les carrières et sablières au Québec ?  
R. Le Règlement sur les carrières et sablières (RCS) est pleinement en vigueur et appliqué depuis 2019, puisque les mesures transitoires prévues pour durer trois ans sont échues depuis le 18 avril 2022.

R. Il n’est pas prévu de réviser le RCS pour le moment. Les dernières modifications considérées, en lien avec l’utilisation du béton et l’enfouissement d’espèces floristiques exotiques envahissantes, entreront en vigueur le 18 décembre 2023.



Q. Est-ce que les entreprises se soumettent bien aux nouvelles contraintes et exigences du RCS ?

R. Le Ministère veille au respect des lois et de la réglementation relative à l’environnement, c’est-à-dire autant par le suivi des autorisations que par le respect des normes environnementales générales.
Le nouveau Règlement sur les carrières et sablières entré en vigueur le 18 avril 2019, introduisait de nouvelles exigences pour l’exploitation d’une carrière ou d’une sablière. Pour ce qui est des sites déjà en exploitation, une période transitoire de trois ans a été prévue pour permettre aux entreprises de se soumettre et d’ajuster les exploitations à ces exigences. De plus, le MELCCFP a produit et publié des feuillets d’information sur son site Carrières et sablières (gouv.qc.ca) afin d’offrir du soutien aux exploitants concernés par cette transition.



Bien qu’un programme de contrôle soit en place afin de réaliser des inspections planifiées, notamment auprès de ces entreprises, le Ministère peut aussi intervenir auprès d’eux lors de signalement à caractère environnemental ou lors d’incident nécessitant l’intervention du service d’Urgence-Environnement afin de vérifier le respect des exigences réglementaires en vigueur.

Toute entreprise est donc susceptible de faire l’objet d’une inspection qui vise à assurer que ces nouvelles exigences réglementaires sous leur responsabilité sont intégrées et respectées.

Q. Est-ce que des nouvelles mesures de protection environnementale s’ajouteront à cette réglementation, notamment en ce qui concerne la naturalisation des sites en fin de vie utile ou épuisés ? 

R. Le RCS a été modernisé en 2019. Il n’y a pas de nouvelle mesure de protection environnementale à ajouter. Le RCS impose déjà le réaménagement et la restauration du lieu. Plusieurs options sont possibles, dont le remblayage par différentes matières et la végétalisation du terrain.  En décembre 2023, en lien avec l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions, du béton pourra dorénavant être utilisé et des espèces floristiques exotiques envahissantes pourront être enfouies lors des travaux.



Q. Qu’est-ce qui est fait pour obliger les entreprises qui déversent ou enfouissent des matières résiduelles ou contaminées dans les sites d’anciennes carrières et sablières ?

R. Le chapitre VIII du Règlement sur les carrières et sablières encadre les travaux de réaménagement et de restauration des carrières et sablières après la fin de l’exploitation de la ressource pour rendre le site à l’environnement. Le plan de réaménagement et de restauration du site est prévu par l’exploitant lors de la demande d’autorisation et il en fait partie intégrante. Ce plan détaille de quelle façon sera fermé le site et les matériaux qui seront utilisés pour les travaux, et ces matériaux permis varient selon qu’il s’agisse d’une carrière ou d’une sablière.

De plus, l’article 33 du Règlement sur les carrières et sablières (Q-2, r. 7.1) exige des exploitants d’une carrière ou d’une sablière qu’ils constituent une garantie financière afin d’assurer l’exécution des obligations de réaménagement et de restauration. Cette garantie doit être fournie avant le début de l’exploitation et être maintenue pendant une période de 18 mois suivant la fermeture.

L’article 37 précise que : « le ministre utilise la garantie fournie par l’exploitant d’une carrière ou d’une sablière dans tous les cas où celui-ci, malgré un avis de remédier à son défaut, refuse ou néglige d’exécuter une obligation à laquelle il est tenu en application de la Loi ou de ses règlements. ». Dans le cas présent, l’article 22 de la Loi sur la qualité de l’environnement précise que les entreprises qui déversent ou enfouissent des matières résiduelles et contaminées doivent préalablement avoir obtenu une autorisation du ministre. Cette garantie financière vise à responsabiliser l’assujetti à l’égard des dommages que ses activités peuvent causer à l’environnement.

Si des manquements sont constatés lors de l’inspection d’un site, tels que l’absence ou le non-respect d’une autorisation délivrée, ou que des activités prohibées par la Loi et les règlements sont constatées, le Ministère peut prendre les recours appropriés et disposer de plusieurs moyens pour le faire, conformément à la Directive sur le traitement des manquements, comme des avis de non-conformité (ANC), des sanctions administratives pécuniaires (SAP), des ordonnances, révocations d’autorisation, injonctions ou recours pénaux. En cas de doute, veuillez consulter les registres publics du MELCCFP.

Q. Est-ce que les carrières et sablières font partie des cibles visées par le gouvernement dans le cadre de son Plan pour une économie verte (PEV 2030) ? Quelles sont les cibles et moyens préconisés ainsi que les mesures et aides financières offertes ?

R. Oui, les carrières et sablières font partie des sources d’émission de GES visées par le PEV 2030.

Sur le plan réglementaire, les carrières et les sablières font partie des secteurs d’activités visés par le

Système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de GES (SPEDE). Toutefois, aucune des carrières ou sablières n’est présentement assujettie au SPEDE, car leurs émissions sont sous le seuil d’assujettissement de 25 000 tonnes en équivalent CO2. Celles-ci doivent toutefois assumer indirectement le coût carbone associé aux carburants et combustibles qu’elles consomment.

Du côté des programmes, les carrières et les sablières ayant un site au Québec font partie de la clientèle visée par le programme ÉcoPerformance. Si ces entreprises implantent des projets de réduction de combustible fossile (ex. : des convoyeurs pour limiter les transports et autres), elles sont admissibles à une aide financière du programme à condition, évidemment, que les critères d’admissibilité au programme soient respectés. Les aides financières de ce programme peuvent aller jusqu’à 75 % des dépenses admissibles pour un montant maximal de 300 000 $ pour un projet d’analyse et jusqu’à 5 M$ pour un projet d’implantation. ■


D’autres sablières et gravières à restaurer et à revaloriser

Le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) dispose encore de quelques millions de dollars pour réaménager et restaurer des sablières en fin de vie utile et pour réaliser des projets de revalorisation du territoire public (sentiers, pistes de vélo, parc, etc.).

Même si son programme d’aide financière lancé en 2021 a pris fin le 31 mars 2023, le Ministère poursuivra la restauration de sablières et gravières sous sa responsabilité sur les terres publiques. Il nous a été confirmé récemment que des contrats sont octroyés aux entrepreneurs à cet effet à travers des appels d’offres publics. Un montant de plus de 900 000 $ a déjà été réservé pour la restauration et la remise en état de 16 sites d’une superficie totale de 36,4 hectares. Ces sites se trouvent dans les MRC d’Abitibi-Ouest, Matawinie, Charlevoix, Côte-de-Beaupré, Bonaventure et Kamouraska.

Rappelons qu’une enveloppe budgétaire de 10 millions de dollars avait été initialement réservée dans son programme d’aide financière pour la remise en état des sablières et gravières dont la ressource est épuisée ou qui ont dépassé les limites permises, ou encore qui sont suspectées de contamination. Ce programme qui visait l’ensemble des municipalités, des MRC et d’autres gouvernements régionaux, communautés autochtones et inuites, a déjà permis la remise en état de 52 sablières et gravières représentant une superficie de 101,3 hectares.

Sur les 10 M$ de financement disponible, un montant de 1,3 M$ a été octroyé. Au total, treize organismes de huit régions administratives ont pu bénéficier de cette mesure de soutien. Il s’agit des MRC ou municipalités suivantes :

  • Antoine-Labelle (Laurentides);
  • Lac-Saint-Jean Est, Maria-Chapdelaine et Le Fjord-du-Saguenay (Saguenay–Lac-Saint-Jean);
  • Matawinie (Lanaudière);
  • Minganie et Manicouagan (Côte-Nord);
  • Rivière-du-Loup et Témiscouata (Bas-Saint-Laurent);
  • Témiscamingue (Abitibi-Témiscamingue)
  • La Corporation foncière Nayumivik de Kuujjuaq et le Village nordique Quaqtaq (Nord-du-Québec);
  • Vallée-de-la-Gatineau (Outaouais).

Le Ministère justifie son programme par sa volonté d’éviter une dégradation environnementale du territoire tout en offrant la possibilité de mettre en valeur les terres publiques. Même si la majorité des sablières abandonnées pendant longtemps finissent par se végétaliser naturellement, d’autres, en revanche, ne réussissent pas et peuvent être l’objet d’activités illicites (rejet des matières résiduelles) ou altérer les sols et les cours d’eau par lessivage causé par la pluie.

Comme le Ministère a la responsabilité de réaménager et de restaurer les sablières non exclusives exploitées en vertu du Règlement sur les carrières et sablières, le programme lui a permis de régler en partie cette situation. ■


État des ressources au Québec
Selon le MRNF, la ressource en granulat est globalement suffisante au niveau provincial. L’état des ressources varie selon les régions au Québec, selon différents facteurs tels que la géologie, l’exploitation des ressources et l’accès à celles-ci.
À titre d’exemple, il existe certaines régions au nord du Saint-Laurent pour lesquelles il y a une plus grande disponibilité de matériaux de qualité en raison de leur géologie. D’autres régions ont une géologie moins favorable pour des granulats de qualité, complexifiant l’accessibilité aux ressources.
Par ailleurs, le Ministère évalue que certaines régions autour de la région métropolitaine de Montréal ont grandement exploitées leurs ressources en sable et en gravier naturel, expliquant que l’approvisionnement se fait à une plus grande distance. Bien que des ressources soient présentes et de qualité pour certains secteurs, la réglementation en vigueur, le zonage municipal ou des mesures de protection n’en permettent pas l’exploitation.