Analyse économique
Le secteur de la construction au Québec
Chronique
construction
AVIS D’expert
Le Québec fait face à un contexte mondial de ralentissement économique qui teinte sa croissance. En effet, les plus récentes données disponibles montrent que la croissance du Québec a été très faible de 2022 à 2023 (+0,4% du PIB réel pour la période comparée de janvier à août). Les principales variables reliées à ce ralentissement (pénurie de main-d’œuvre, rupture dans la chaîne d’approvisionnement, inflation et taux d’intérêt élevés) causent des défis significatifs à plusieurs secteurs, dont celui de la construction.
Par Zyna Boubez, Associée, Services-conseils en infrastructure mondiale et leader nationale, Transport, KPMG au Canada
Malgré ces défis, les perspectives sont prometteuses pour le secteur et plus précisément celui du génie civil et voirie en raison de plusieurs projets en cours et à venir au Québec. De plus, l’intégration des technologies se présente comme une avenue pour atténuer les impacts liés au problème de pénurie de main-d’œuvre bien qu’elle ne représente pas une solution miracle.
« Le secteur de la construction, notamment le génie civil et voirie, est en bonne posture pour les cinq prochaines années. La pénurie de main-d’œuvre est un enjeu qui risque de perdurer, mais les entreprises de la construction peuvent compter sur les nouveaux outils technologiques pour le surmonter. Ainsi, les investissements et l’intégration des technologies se présentent comme un levier clé pour le secteur de la construction. »
Perspectives du secteur de la construction
De 2022 à 2023, le PIB réel du secteur de la construction a diminué de 3,84% (pour la période comparée de janvier à août). Cependant, il est important de noter que cette diminution a été enregistrée dans un contexte où le PIB réel de 2022 avait connu sa meilleure performance depuis les 10 dernières années. De plus, le nombre d’emplois moyen a augmenté de +6,48% de 2022 à 2023 (pour la période comparée de janvier à novembre – données les plus récentes), ce qui démontre que les entreprises sont optimistes quant aux années à venir. Un sondage mené par KPMG l’an dernier auprès de 275 entreprises en construction au Canada, dont 35 au Québec, vient appuyer ce constat puisque, malgré le fait que 71% des 35 entreprises du Québec affirmaient s’attendre à une récession dans les 12 prochains mois, 64% d’entre elles estimaient qu’elle serait légère et de courte durée (entre 3 et 6 mois).
La performance du secteur de la construction varie grandement entre le résidentiel et le non résidentiel. Le résidentiel a connu une chute de son PIB de 14,35% de 2022 à 2023 (pour la période comparée de janvier à août). Pour sa part, le non résidentiel, dont le génie civil et voirie fait partie, a affiché une bonne performance malgré le contexte de ralentissement économique avec une croissance de +2,71%. Plus spécifiquement, le secteur du génie civil et voirie a connu une augmentation importante de son nombre d’heures travaillées en 10 ans (+21% de 2013 à 2022). Les heures travaillées devraient rester élevées dans les cinq prochaines années avec les projets d’envergure en cours tels que notamment le REM, le prolongement de la ligne bleue et la réfection du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine. L’avenir est donc prometteur pour le génie civil et voirie.
Pénurie de main-d’œuvre et utilisation des technologies
Même si le secteur de la construction semble résilient aux perturbations économiques mondiales, les entreprises en construction font face à plusieurs enjeux pour répondre à la demande qui persistera au cours des cinq prochaines années. Parmi ces enjeux, la pénurie de main-d’œuvre est majeure. En effet, 89% des répondants interrogés, dans le cadre du sondage mené par KPMG, ont déclaré faire face à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée et 94% des répondants ont déclaré que la pénurie de main-d’œuvre avait un impact sur leur capacité à répondre à des appels d’offres et/ou à respecter les délais de projets.
Dans ce contexte, l’intégration de la technologie dans les activités de construction fait partie des solutions considérées. En effet, 94% des répondants ont déclaré qu’avec les contraintes actuelles en matière de main-d’œuvre, ils envisagent intégrer des solutions innovantes telles que la préfabrication et modularisation afin de mitiger cet enjeu. De plus, 91% affirment que les outils de gestion de projet tel que le BIM (Building Information Modeling) et le jumeau numérique permettent une main-d’œuvre plus efficace aidant ainsi à faire face à la pénurie.
Il faut toutefois noter que le contexte économique actuel limite les investissements en technologie. En effet, 82 % des répondants affirment que l’environnement économique actuel (taux d’intérêt élevés, inflation, etc.) limite les investissements des entreprises dans des outils et des technologies qui pourraient les rendre plus compétitifs.
Conclusion
Le secteur de la construction, notamment le génie civil et voirie, est en bonne posture pour les cinq prochaines années. La pénurie de main-d’œuvre est un enjeu qui risque de perdurer, mais les entreprises de la construction peuvent compter sur les nouveaux outils technologiques pour le surmonter. Ainsi, les investissements et l’intégration des technologies se présentent comme un levier clé pour le secteur de la construction. ■