MAGAZINE CONSTAS

CCQ : UNE STABILITÉ ANNONCÉE

Les perspectives 2019 avec Diane Lemieux, PDG de la Commission de la construction du Québec

Record des heures travaillées de 2012 : 165 M.
Heures travaillées en 2018 : 160 M.
« Le total 2019 serait probablement dans les mêmes eaux», prévoit Diane Lemieux.

« Quand le bâtiment va, tout va », dit l’adage. Une pensée que la présidente-directrice générale de la Commission de la Construction du Québec (CCQ), Diane Lemieux, pourra faire sienne, car les perspectives pour 2019 sont stables et vont bien. Or, si l’accessibilité des femmes aux métiers de l’industrie marque, doucement mais sûrement, des points, la relève de la main-d’œuvre vieillissante, pour sa part, sera l’un des durs défis de cette nouvelle année.

par Michel Joanny-Furtin

En effet, « sans toutefois atteindre le record de 2012, avec ses 165 millions d’heures travaillées, nous avons observé une progression tout de même très forte en 2018 avec plus de 160 millions d’heures travaillées », explique Diane Lemieux. « À ce jour, et au regard des premiers chiffres de nos analystes et les perspectives qui s’annoncent, le total 2019 serait probablement dans les mêmes eaux. Cette stabilité de l’industrie est le fruit de chantiers importants et structurants pour le développement économique du Québec, comme entre autres le nouveau pont Champlain ­­­­–un chantier à finir en 2019 – le REM (Réseau express métropolitain) et les investissements programmés par la Ville de Montréal », détaille-t-elle. « Bref, un secteur génie civil et voirie très vivant et stable. »

Pour le secteur industriel, « on ne parlera pas de sommets, résume la présidente de la CCQ, mais il se maintiendra dans la même veine avec des projets comme la nouvelle usine de papier Kruger à Sherbrooke (2019-2021, avec plus d’un demi-milliard de dollars d’investissements) ou la nouvelle usine d’éthanol à Varennes. » En ce qui concerne le secteur institutionnel et commercial, s’ajoutent la Tour de la Banque nationale, le « Phare », un projet d’immeuble résidentiel et commercial à Québec et, bien sûr, la dernière phase du CHUM (Centre hospitalier universitaire de Montréal). « Dans ce secteur, poursuit Diane Lemieux, on retiendra le projet de la plus haute tour résidentielle jamais construite à Montréal, la tour Victoria sur le Parc (200 mètres, 58 étages… et 300 millions). Par ailleurs, le secteur résidentiel se porte également bien et la revente rapide des maisons et condos annonce d’assez bonnes perspectives pour l’industrie. »
Pénurie

Or, d’autres enjeux concernent la pénurie de main-d’œuvre dans certains métiers de la construction. Une pénurie qualitative aussi en termes de compétences. « D’ici quelques années seulement, la main-d’œuvre s’avérera plus rare, parce que très sollicitée, mais aussi vieillissante. De plus, la rançon du succès de cette grande activité de l’industrie, c’est qu’elle génère une baisse du nombre de travailleurs diplômés, explique Diane Lemieux, car beaucoup trouvent des emplois directement, avant même de finir leur cursus d’études professionnelles. Augmentant, par le fait même, le nombre d’une main-d’œuvre moins diplômée… ». D’où l’importance d’un programme de formation continue étoffé, pertinent et diplômant.

« En 2018, nous avons franchi le cap de 3000 femmes actives dans l’industrie de la construction, soit près de 2 % », précise la présidente de la CCQ.

Un premier bilan du PAEF

Le Programme d’accès à l’égalité des femmes (PAEF) cible une participation exponentielle des femmes afin d’en corriger la sous-représentation et la discrimination systémique auxquelles elles font face. « Notre objectif était de 3 % de femmes environ parmi les 157 000 travailleurs de l’industrie. En 2018, nous avons franchi le cap de 3000 femmes actives dans l’industrie de la construction, soit près de 2 % », précise la présidente de la CCQ. « Par ailleurs, le marché de l’emploi dans l’industrie s’ouvre à elles et pas moins de 9,5 % des 2500 employeurs de la construction embauchent avec intérêt des femmes. Certes, ce n’est pas suffisant, mais dans un secteur économique plutôt conservateur, c’est un bon début. C’est homéopathique, mais irréversible ! »

« Nous avons de bonnes nouvelles en ce qui concerne la diplomation des femmes de la construction, poursuit Diane Lemieux. De plus en plus d’entre elles progressent dans leur formation, complètent leur diplôme d’études professionnelles et obtiennent leur statut de compagnon. Par surcroît, le milieu de la construction se montre de plus en plus ouvert et se mobilise pour cette nouvelle culture professionnelle. »
Aussi, dans le cadre du Programme d’accès à l’égalité pour les femmes dans l’industrie de la construction, « nous recueillons des témoignages fort intéressants de la part d’employeurs qui ont recours à la formation sur la mixité dans leurs équipes de travail. Cela démontre l’impact énorme de la présence des femmes sur les chantiers, notamment dans les relations entre les travailleurs », affirme la présidente Lemieux. « Des maladresses, parfois, mais on y observe plus de respect, “même le ton de voix a changé”, me disent certains employeurs », avance-t-elle. « Pour eux, ça a du sens : l’opportunité de changer le climat de travail et de l’améliorer… »

D’autres groupes sociaux

Dans le même ordre d’idée, la CCQ réfléchit aux moyens à déployer pour accompagner l’industrie afin qu’elle s’adapte aux nouvelles réalités. « Il ne faut pas oublier que, dans le contexte d’une pénurie de main-d’œuvre qui s’annonce, rappelle Diane Lemieux, l’industrie se doit d’être plus inclusive en s’ouvrant à d’autres bassins d’employabilité comme les femmes, les immigrants ou les autochtones. »

« Nous aurons un bilan de ce PAEF plus exhaustif en 2019 », conclut la présidente de la CCQ. « Son analyse nous permettra d’effectuer des réajustements plus chirurgicaux, pourrais-je dire. Mais la part des gains versus les écueils nous laisse entrevoir une conjoncture positive dans ce sens. » •